Le sommet entre Trump et Kim reste fragile
Mike Pompeo, patron de la CIA et probable futur chef de la diplomatie américaine, a rencontré Kim Jong-un en personne à Pyongyang. Mais le chemin vers le sommet entre le président des Etats-Unis et le leader nord-coréen est encore semé d’embûches
Le secret a tenu un peu plus d’une semaine. Donald Trump a fini par confirmer mercredi que Mike Pompeo a bien rencontré Kim Jong-un en personne, la semaine dernière, à Pyongyang. Pour le directeur de la CIA, secrétaire d’Etat pressenti, la mission est des plus sensibles. Objectif: poser les jalons d’une rencontre au sommet entre le président américain et le leader nord-coréen, sans rien céder. Une rencontre historique, inimaginable il y a encore quelques mois. Mais la prudence est de mise: si les préparatifs vont bon train, les obstacles restent nombreux.
John Bolton parle d’échec
Très peu a filtré sur la rencontre. Donald Trump a confirmé une information du Washington Post par un simple tweet: «Mike Pompeo a rencontré Kim Jong-un en Corée du Nord la semaine dernière. La rencontre s’est bien déroulée et une bonne relation s’est établie. Les détails du sommet sont à l’étude. La dénucléarisation sera un grand événement pour le monde, mais aussi pour la Corée du Nord.»
L’organisation du futur sommet, qui pourrait se dérouler début juin dans un lieu à préciser – la Suisse fait partie des pistes évoquées –, est fragile. D’abord, en raison de son but: pousser la Corée du Nord à se dénucléariser, après des années de bras de fer. Puis, à cause des changements d’interlocuteurs à la Maison-Blanche, en raison de limogeages. Mike Pompeo remplace Rex Tillerson, brutalement écarté, et le faucon va-t-en-guerre John Bolton vient de prendre la place du conseiller à la sécurité nationale H. R. McMaster. Deux «durs» qui détrônent des modérés et peuvent donner des sueurs froides aux Nord-Coréens.
Leur nomination donne une nouvelle inflexion conservatrice à la politique étrangère américaine. A cela s’ajoute la démission précipitée, fin février, de Joe Yun, le représentant spécial du Département d’Etat pour la Corée du Nord. Le départ de ce partisan du dialogue, peu après le sixième essai nucléaire de Kim Jong-un, est révélateur des tensions au sein de l’administration Trump sur l’attitude à adopter face à la Corée du Nord.
Sur Fox News, John Bolton n’a pas hésité à déclarer, en mars, qu’il ne voyait pas la rencontre entre Donald Trump et Kim Jong-un d’un bon oeil. Il a même prédit un échec, qui provoquera des actions militaires. Mike Pompeo n’est pas non plus des plus optimistes. La semaine dernière, lors de son audition devant le Sénat qui doit encore confirmer sa nomination à la tête de la diplomatie américaine, il a clairement fait savoir que la Corée du Nord ne doit attendre aucune gratification des Etats-Unis tant qu’elle n’engage pas des «mesures irréversibles en vue de l’abandon de ses armes nucléaires». Il a rappelé que lors de précédentes négociations, les sanctions imposées à Pyongyang avaient été levées trop rapidement.
«Ils nous respectent. Nous les respectons»
Pour cette rencontre secrète, Donald Trump a privilégié le canal des services secrets à celui de la diplomatie, alors que le chaos couve au Département d’Etat. Mais c’est surtout lié à la personne de Mike Pompeo et à la confiance qu’il lui porte, Rex Tillerson étant déjà mis au placard. Le Secrétaire d’Etat limogé n’a par ailleurs pas caché ses dissensions avec le président américain sur ce dossier. Le voyage secret de Mike Pompeo a été confirmé alors que Séoul annonce de son côté étudier des pistes pour un éventuel traité de paix avec le Nord, quelques jours avant le sommet intercoréen prévu le 27 avril.
Après de longs mois d’escalades verbales qui faisaient craindre le pire, Donald Trump joue la carte de l’apaisement. Mardi, depuis sa résidence de Mar-a-Lago, en Floride, où il recevait le premier ministre japonais, le président américain a eu des mots inhabituellement conciliants envers les Nord-Coréens. «Ils nous respectent. Nous les respectons. L’heure est venue de parler, de résoudre les problèmes», a-t-il lâché devant des journalistes. Il a toutefois ajouté: «Mais il est possible que les choses tournent court et que les rencontres ne se concrétisent pas.»
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