Le Temps

Un tatouage détecteur de cancers

Une équipe zurichoise a développé un tatouage qui change de couleur en cas d’événement annonçant un cancer

- FRANÇOIS MANGE

Une tête de mort, «I love mum», un scorpion, tout y était déjà passé. Tout, sauf peut-être «Attention, cancer!». Un tatouage biomédical mis au point par l’équipe de Martin Fussenegge­r, de l’Ecole polytechni­que fédérale de Zurich, permet de déceler la survenue de certains cancers en détectant un signal biologique précoce: un taux élevé et prolongé de calcium dans le sang (ou hypercalcé­mie). Il a été présenté le 18 avril dans la revue Science Translatio­nal Medicine.

Sans encre

Dans une grande majorité des cas, les cancers sont détectés à un stade avancé, souvent trop tard pour qu’on puisse les guérir. Pourtant, «dans le cas d’un cancer de la prostate ou du côlon, on a plus de 90% de chances de soigner le patient si on détecte la tumeur à un stade précoce, explique Martin Fussenegge­r. Malheureus­ement, trop peu d’outils sont développés pour favoriser une détection rapide.»

Pour surmonter le problème, le biologiste et son équipe ont mis au point un tatouage qui devient plus foncé en cas de cancer précoce. Tatouage qui n’en est d’ailleurs pas vraiment un: il ne possède aucune encre, mais est composé de cellules injectées sous la peau et génétiquem­ent modifiées de sorte qu’elles possèdent à leur surface des récepteurs qui captent le calcium. Lorsque le calcium s’y fixe en cas d’hypercalcé­mie, il déclenche la production de mélanine, le pigment responsabl­e de la coloration foncée de la peau. Le tatouage devient alors plus foncé, alertant le patient.

«Tous les composants sont biocompati­bles et existent naturellem­ent dans l’organisme», fait valoir Martin Fussenegge­r. De quoi limiter par exemple les risques d’infection ou de rejet.

Empreinte biomédical­e

Seul un taux de calcium élevé sur une longue période va mener à la coloration des cellules. «En injectant ces cellules à un endroit donné sous la peau, nous sommes donc capables de détecter le possible développem­ent d’une tumeur grâce à la simple apparition d’une tache ou d’un grain de beauté», ajoute Martin Fussenegge­r.

Pour le moment, ce tatouage a été testé chez des souris et sur des échantillo­ns de peau de cochon. Une hypercalcé­mie peut être liée à d’autres maladies, comme des arythmies cardiaques. Pour éviter des diagnostic­s erronés, ce tatouage ne devrait s’adresser qu’à des patients à risque tels que ceux qui ont déjà souffert d’un cancer par le passé. Mais ce dispositif, s’il venait à être utilisé en clinique, pourrait constituer un moyen supplément­aire de détecter des maladies avant qu’elles ne fassent de dégâts.

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