Le Temps

L’agression d’un Arabe israélien portant une kippa à Berlin enflamme le web

- CATHERINE FRAMMERY @cframmery

Un jeune Arabe israélien a été attaqué à coups de ceinture après avoir voulu tester son environnem­ent en arborant le couvre-chef des juifs. La vidéo de son agression relance le lancinant débat sur l’antisémiti­sme en Allemagne

La vidéo est devenue virale après avoir été partagée sur Twitter et Facebook par le Forum juif pour la démocratie et contre l'antisémiti­sme en Allemagne, où elle a en quelques heures cumulé plus de 300 000 vues. On y entend crier «juif» en arabe, et l'on y voit un agresseur donner de grands coups de ceinture à la victime qui filme.

La scène se passe mardi en fin d'après-midi dans le quartier berlinois cossu de Prenzlauer Berg. Les agresseurs étaient trois, dont un au moins parlait un «dialecte arabe syrien», et ils s'en sont pris aux deux jeunes manifestem­ent parce qu'ils portaient une kippa, a raconté le jeune homme par la suite à la Deutsche Welle. Un jeune homme qui n'est pas juif lui-même, mais Arabe israélien, présenté comme Adam, 21 ans, qui avait voulu tester son environnem­ent en portant une kippa qu'un ami lui avait offerte. En filmant son agression, il voulait avoir «une preuve pour la police, les Allemands mais aussi le monde entier, pour montrer combien c'est difficile pour un juif de se promener de nos jours à Berlin».

«Que quelque chose comme ça soit arrivé, à côté de chez moi, (...) je suis sous le choc», a-t-il ensuite confié à la chaîne israélienn­e Kan, citée par la BBC. Toute la presse allemande et israélienn­e rend compte de l'agression. «Ça suffit. Ça suffit. Ça suffit!» tonne ainsi Die Welt et les réactions sont très vives sur les réseaux sociaux: «Vous ne croyez pas à ces histoires de juifs attaqués parce qu'ils sont juifs? Mettez une kippa comme l'a fait cet Arabe israélien et osez marcher dans les rues des villes d'Europe», propose @MargieInTe­lAviv.

Beaucoup d'internaute­s partagent aussi à nouveau l'enquête du Daily Beast parue la semaine dernière, «L'antisémiti­sme est vivant et se porte bien à Berlin». On y retrouve notamment le chiffre de 600 agressions antisémite­s en Allemagne en 2017, cité par le Ministère de l'intérieur. «Dégoûtant, dérangeant. L'Allemagne ferait mieux de faire quelque chose, les juifs doivent se sentir en sécurité en Allemagne», commente le renommé rabbin américain Shmuley, un compte suivi par 240 000 abonnés.

Mais une série d'internaute­s ont une lecture plus orientée de l'agression. L'agression est en effet pour beaucoup l'occasion de blâmer les portes ouvertes aux migrants par Angela Merkel. «Elle sera responsabl­e du génocide des juifs en Europe, c'est le successeur d'Hitler. #WelcomeRef­ugees, lit-on sur Twitter. Les comptes de médias très orientés comme l'américain Breitbart, la russe RT ou des comptes pro-Brexit ne floutent pas le visage de l'agresseur. Un visage jeune, bronzé, arabe. «Au fait, les attaques antisémite­s en Allemagne sont automatiqu­ement catégorisé­es comme crimes d'extrême droite. Donc pas de chiffres sur la violence des musulmans contre les juifs», croit savoir la journalist­e israélo-américaine Caroline Blick, contributr­ice à Breitbart. Quand les agendas se recoupent…

Les autorités allemandes sont en alerte. «C'est bien sûr un incident terrible et nous allons réagir, a commenté la chancelièr­e. Ce combat (...) doit être gagné, il en va de la réputation de notre Etat, et nous nous engageons de toutes nos forces.» «Une honte pour notre pays. (...) Il faut tout faire pour protéger la vie des juifs en Allemagne», a aussi tweeté la ministre de la Justice, Katarina Barley. Celui des Affaires étrangères a aussi réagi.

«Toute cette histoire est dérangeant­e. Les Européens doivent faire plus pour combattre l'antisémiti­sme. Ce qui commence avec les juifs ne s'arrête jamais avec les juifs», commente tristement le porte-parole de la fédération canadienne. Très dérangeant aussi: plus de 50 personnes sont passées dans la rue pendant l'agression, sans réagir.

Capture d’écran issue de la vidéo tournée avec son téléphone par la victime présumée, Adam.

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