Le Temps

La limousine de Poutine, nouvelle fierté nationale

- EMMANUEL GRYNSZPAN, MOSCOU @_zerez_

Chef d’Etat d’une grande puissance, campé sur sa souveraine­té, Vladimir Poutine ne pouvait indéfinime­nt rouler dans une voiture allemande. Qui plus est d’un pays traité comme un ennemi dans les médias d’Etat, même si Poutine continue à en parler comme d’un «partenaire».

A partir de la cérémonie d’investitur­e de son 4e mandat, le 7 mai prochain, le président russe devrait progressiv­ement troquer sa MercedesBe­nz S 600 Guard Pullman pour une limousine baptisée Cortège du fabricant russe NAMI, mot qui signifie approximat­ivement «par nous». NAMI est l’abréviatio­n de Centre scientifiq­ue de recherche automobile, une entreprise qui portait à l’époque soviétique le nom moins glamour d’Institut de recherche des tracteurs.

Vieille tradition soviétique

Le projet Cortège a été lancé en 2012 et son développem­ent aurait coûté 12 milliards de roubles aux contribuab­les russes, selon le quotidien en ligne Gazeta.ru. Les lignes épaisses de cette limousine évoquent une version encore plus anguleuse du modèle Phantom de RollsRoyce. Le moteur de 12 cylindres développe une puissance maximum de 860 chevaux (contre 563 pour le V12 de la RollsRoyce Phantom VIII). Mais on ne sait rien des qualités routières du nouveau véhicule, sinon qu’il a déjà été brièvement pris en main par Vladimir Poutine et qu’il a passé avec succès son premier crash test.

Pour être conforme aux standards de sécurité drastiques élaborés par le FSO (Service fédéral de protection russe), la nouvelle limousine devra, comme sa devan cière, comporter les blindages les plus sophistiqu­és et être bourrée de systèmes de défense comme d’attaque. Principale différence avec une voiture de James Bond: la Cortège sera systématiq­uement entourée d’une imposante flotte de dizaines d’autres véhicules.

La voiture évoque, en plus anguleux, le modèle Phantom de Rolls-Royce

Le Kremlin, qui en a déjà commandé 14 exemplaire­s, renoue ainsi avec la tradition soviétique: les secrétaire­s généraux circulaien­t alors dans les monstrueus­es limousines ZIL, longues et noires comme des corbillard­s. Une tradition à laquelle le président Boris Eltsine avait mis fin en 1991, optant pour une flotte de berlines allemandes.

Seuls huit pays au monde permettent à leurs chefs d’Etat de rouler dans une voiture domestique: les EtatsUnis, le RoyaumeUni, l’Allemagne, la France, l’Italie, la République tchèque, le Japon, la Corée du Sud et la Chine.

Quelques détails gâchent l’orgueil russe cependant: le moteur de la Cortège est conçu par Porsche et le véhicule est assemblé dans une usine Ford Sollers localisée en Russie.

Selon l’agence TASS, la Cortège devrait être commercial­isée à partir de 2019 pour un prix plancher provisoire de 7 millions de roubles (111000 francs), puis sera déclinée dans plusieurs versions plus ou moins luxueuses. Elle sera présentée au public lors d’un salon de l’automobile de Moscou, dont la limousine devrait être le clou. Sauf incident, la voiture devrait aussi être l’unique sujet d’excitation lors de la quatrième investitur­e de Vladimir Poutine.

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