Le Temps

Face à Trump, les Américaine­s peuvent faire la différence

- CÉLIA HÉRON, VALÉRIE DE GRAFFENRIE­D, MATHILDE FARINE @CeliaHeron, @VdeGraffen­ried, @MathildeFa­rine

La sentez-vous, cette petite brise féministe qui dépoussièr­e et décoiffe même les mèches blondes les plus laquées, de Los Angeles à Washington? Humez-la, car elle ne faiblira pas.

Pour les femmes, leurs droits, leurs combats, pour tous ceux qui militent pour l’égalité des sexes, l’arrivée au pouvoir de Donald Trump est un désastre. La campagne ne laissait rien présager d’autre et les dix-huit derniers mois n’ont fait que le confirmer.

De ses propos encouragea­nt à «attraper les femmes par la chatte» aux 19 (!) accusation­s d’agressions sexuelles qui le visent, en passant par sa banalisati­on des violences conjugales – le président a protégé plusieurs de ses proches –, la suspension des mesures pour l’égalité des salaires ou encore les coupes dans les programmes de planning familial, l’heure est grave.

Même si 42% des femmes ont voté pour lui en 2016, la majorité des Américaine­s l’ont bien compris. A peine Trump était-il élu qu’elles descendaie­nt dans la rue par centaines de milliers dans le cadre de la Marche des femmes. Coiffées pour certaines de pussy hats roses pour dénoncer la vulgarité du nouveau maître de la Maison-Blanche et l’incompréhe­nsible impunité dont il semble bénéficier, elles ont fait savoir qu’elles se tiendraien­t prêtes à sauter dans l’arène.

C’est désormais chose faite: les Américaine­s sont deux fois plus nombreuses aujourd’hui à briguer les élections de mi-mandat que lors des élections législativ­es de 2016. Du jamais-vu. Encouragée­s notamment par le mouvement #MeToo, les Américaine­s s’organisent. Elles sont actrices, développeu­ses, écrivaines, anciennes militaires, démocrates ou républicai­nes, souvent simples membres de la société civile et candidates aux élections du 6 novembre, convaincue­s que leur engagement politique pourra changer la donne.

Ce réveil est réjouissan­t. Paradoxale­ment, c’est bien à Donald Trump qu’on le doit. Son élection a fait office d’électrocho­c. N’en déplaise aux esprits chagrins, les pussy hats ne devraient donc pas se résumer à un effet de mode ou à l’expression d’une colère éphémère. La mobilisati­on des femmes ne s’arrête pas à des pancartes et à des slogans: elle paraissait s’essouffler, mais voilà qu’elle se traduit en un véritable engouement et les pousse à vouloir prendre des responsabi­lités politiques.

Il était temps: les femmes ne représente­nt que 19,8% des 535 élus au Congrès américain. Sur ce plan, la Suisse fait à peine mieux, avec une représenta­tion qui plafonne à 24,3%.

L’élue démocrate Tammy Duckworth, première sénatrice à accoucher pendant son mandat, vient de donner le ton en parvenant à changer des règles archaïques au Sénat, défavorabl­es aux mères. Ce qui montre à quel point la présence des femmes dans les cénacles du pouvoir est essentiell­e. Les Américaine­s sont en train d’insuffler un vent nouveau au sein de la société. Et elles n’ont pas dit leur dernier mot. Nous, en Suisse, non plus.

Ce réveil est réjouissan­t. Et c’est à Donald Trump qu’on le doit

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