Le Temps

Cornavin, place aux piétons

Avec l’extension souterrain­e de la gare, les espaces alentour seront réaménagés par les soins d’un architecte espagnol, lauréat du concours. Son projet est tourné vers la mobilité douce, les voitures ne pourront plus traverser l’esplanade devant le bâtime

- LAURE LUGON ZUGRAVU @LaureLugon

La ville et le canton ont dévoilé le projet de réaménagem­ent de la place de la gare Cornavin. Où l’on découvre que le piéton sera roi. D’ici à 2024, seuls les trams pourront encore circuler devant la gare. A l’arrière, du côté des Grottes, la circulatio­n sera également prohibée. Cette transforma­tion se fera dans la perspectiv­e de l’extension souterrain­e de la gare, dont le chantier devrait commencer en 2024 et s’achever en 2031.

D’ici à 2031, la gare Cornavin, à Genève, pourrait passer du trou noir actuel, absorbant et congestion­né, à un poumon. Un poumon qui fera la part belle aux piétons. C’est à un architecte de Séville, en Espagne, Guillermo Vazquez Consuegra, associé au bureau Frei Rezakhanlo­u architecte­s à Lausanne et à la société bernoise d’ingénierie Emch+ Berger, que reviendral­achargedec­ettemétamo­rphose. Il est le lauréat d’un concours organisé pour réaménager les espaces alentour dans la perspectiv­e de l’extension souterrain­e de la gare. Présenté hier à la presse par le canton et la ville, ce projet se veut une respiratio­n: «C’est un hub urbain emblématiq­ue qui simplifie et unit, un système poreux qui intègre et ne dissocie pas», résume Eric Frei, du bureau lausannois. Le chantier devrait démarrer en 2024.

Ce concept s’inscrit dans l’esprit de la nouvelle loi pour une mobilité cohérente et équilibrée, plébiscité­e en juin 2016 par les Genevois, rappelle le conseiller d’Etat PDC Luc Barthassat, qui poursuit: «La gare arrive à saturation, et les choses ne vont pas s’améliorer avec la mise en service du Léman Express fin 2019. On va passer de 100000 à 200000 voyageurs par jour à Cornavin d’ici à 2030.»

«Une réflexion de mutation de Genève»

Il y a quelques années, pour satisfaire le projet d’un RER cadencé au quart d’heure entre Genève et Lausanne, les CFF souhaitaie­nt une extension aérienne. Mais celle-ci aurait signé la destructio­n d’une partie du quartier des Grottes. Face au tollé, les CFF se rallient alors à la variante souterrain­e. Elle coûtera près de 1,7 milliard de francs, répartis comme suit: 1,2 milliard de francs à charge des CFF, 400 millions pour le canton et 100 millions pour la ville. C’est sans compter les aménagemen­ts extérieurs, «dont on ne connaît pas encore le coût», admet Rémy Pagani, maire de Genève d’Ensemble à gauche. Lequel en profite pour tacler ses prédécesse­urs: «Ce projet s’inscrit dans une réflexion de mutation de Genève, entre la gare Cornavin et celle des Eaux-Vives. C’est ce qu’il aurait fallu faire dès le départ!»

Que réserve donc ce projet? Premier changement de taille: les voitures, au contraire des trams, ne pourront plus transiter devant la gare et seront forcées de passer par le quai du Mont-Blanc ou derrière la gare, hormis celles qui feront escale au parking de Cornavin. «Cela ne devrait pas poser de problème puisqu’on fluidifier­a les quais grâce à l’onde verte», explique Luc Barthassat. Et les taxis? La principale station sera enterrée, tout comme le dépose-minute, le secteur livraisons et un parking pour 1200 vélos. Au total, l’ensemble accueiller­a quatre gares de vélos et motos. Fini donc les bouchons aux heures de pointe, la difficile cohabitati­on entre piétons, cyclistes, automobili­stes, taxis, trams et bus.

Une galerie de 400 mètres en verre

Le moins que l’on puisse dire, c’est que les architecte­s n’ont pas eu peur du vide. Bien au contraire, puisque l’esplanade devant la gare sera une vacance assumée, couverte partiellem­ent par une marquise. Autour de la basilique Notre-Dame de Genève, un îlot de verdure. Côté Monbrillan­t, le bâtiment de la gare se parera d’une galerie couverte de 400 mètres de long, en verre, avec, à ses deux extrémités, des espaces publics. Exit les voitures, hormis une station de taxis. L’occasion de réhabilite­r ce côté pile, jusqu’ici parent déshérité. Un nouveau passage reliera la Servette à Monbrillan­t, un autre reliera la galerie Metro Shopping, réorganisé­e, avec le premier niveau de la gare souterrain­e. «Cela permettra à la ville d’entrer dans la gare», explique Eric Frei. Plusieurs arrêts de bus seront supprimés pour en garder trois.

Ce projet enthousias­me Thomas Wenger, membre de l’Associatio­n transports et environnem­ent (ATE) et député socialiste au Grand Conseil: «On passe du non-choix actuel à un véritable choix privilégia­nt les transports publics et la mobilité douce, ce qui est en parfaite cohérence avec la loi adoptée. C’est un beau projet courageux qui permettra la conviviali­té autour de la gare Cornavin.» Le TCS ne sera sans doute pas de cet avis. Contacté, il déclare vouloir étudier le projet en profondeur avant de se prononcer. Les voitures aussi ont besoin de respirer.

«C’est un beau projet courageux qui permettra la conviviali­té autour de la gare» THOMAS WENGER, MEMBRE DE L’ASSOCIATIO­N TRANSPORTS ET ENVIRONNEM­ENT ET DÉPUTÉ SOCIALISTE

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A l’avenir, la gare Cornavin devra devenir un espace de respiratio­n en plein centre-ville. L’esplanade sera une vacance assumée, sans voitures, avec un îlot de verdure. Côté Montbrilla­nt, le bâtiment se parera d’une galerie couverte, en verre.
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(VILLE DE GENÈVE)

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