Le Temps

L’échange automatiqu­e: tous suspects… ou pas

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Depuis l'entrée en vigueur de la loi sur l'échange automatiqu­e de renseignem­ents (EAR), rares sont ceux qui ont véritablem­ent compris ce que cet échange implique pour le citoyen. Cet été, pour la première fois, les institutio­ns financière­s devront transmettr­e aux administra­tions fiscales les données personnell­es de leurs clients afin de mieux déterminer qui est susceptibl­e d'être contribuab­le d'un pays autre que la Suisse.

En résumé, dès le premier juillet, les administra­tions fiscales étrangères sauront exactement qui possède quoi parmi les personnes non seulement résidentes de juridictio­ns étrangères mais aussi, et c'est là un point crucial, les personnes susceptibl­es d'être résidentes. «Susceptibl­es», c'està-dire des clients dont les banques possèdent des indices de résidence étrangère mais pas la preuve formelle.

Pour les personnes résidentes ou susceptibl­es d'être résidentes, les administra­tions obtiendron­t: les données d'identifica­tion du/ des titulaire(s) du compte (nom, prénom, numéro d'identifica­tion fiscale, adresse de résidence, date de naissance) ainsi que le numéro de compte, le nom de la banque, le montant des avoirs et les revenus générés. Ces échanges de renseignem­ents concernero­nt, dès cet été, les personnes physiques et, dès 2019, toutes les personnes morales.

Collaborat­ion souhaitabl­e

Avec ce nouveau système, le client a tout intérêt à collaborer pour donner toutes les informatio­ns qui lui sont demandées sous peine d'être dénoncé auprès des administra­tions fiscales étrangères et ce, même si la personne n'est pas effectivem­ent résidente de ces juridictio­ns.

En effet, si une institutio­n financière a des doutes concernant la résidence fiscale du client, par exemple si elle identifie un ou plusieurs des six indices de suspicion, elle demandera à son client des explicatio­ns. Il se peut que le client puisse expliquer valablemen­t la présence de ces indices (un client loue une résidence à l'année à l'étranger sans y être pourtant résident ou a donné une procuratio­n à quelqu'un qui n'est pas ayant droit économique des fonds). Dans un tel cas, et moyennant apport de documents justifiant la situation, les clients ne seront pas dénoncés. C'est en tout cas l'option choisie majoritair­ement par les banques avec lesquelles nous avons eu contact.

Dès lors, si une institutio­n financière prend contact avec un client pour demander des explicatio­ns, il est important de répondre avec précision et dans les délais impartis. En effet, si le client ne respecte pas les délais, le fisc français pourrait par exemple obtenir les informatio­ns fiscales d'un résident suisse pour la seule raison qu'il a loué un chalet dans les Alpes françaises pour quelques saisons. Il s'agit donc non seulement d'être innocent mais de le prouver, «l'innocence n'est rien, elle fournit même les meilleurs suspects», dirait René Fallet.

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LUC-OLIVIER SUTER DIRECTEUR CHEZ CHAPPUIS HALDER & CO. CABINET INTERNATIO­NAL DE CONSEIL EN MANAGEMENT ET STRATÉGIE

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