Le Temps

Le congé maternité et le Care

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FRANÇOISE PIRON, DIRECTRICE FONDATION PACTE, EXPERTE POUR LES QUESTIONS D’ÉGALITÉ, LAUSANNE

Faire croire qu’il suffirait de remplacer le congé maternité par un congé parental pour qu’on en finisse avec l’inégalité salariale est fort sympathiqu­e (lire LT du 20 avril), mais la réalité mérite une analyse plus approfondi­e. A la suite d’une naissance, offrir un congé à parts égales entre la mère et le père aurait, selon l’auteur de cet article, un impact important en termes d’égalité, d’une part sur le développem­ent du parcours profession­nel des femmes et d’autre part sur l’égalité salariale. Qu’en est-il sur le terrain? Lorsque l’on compare le parcours profession­nel des hommes à celui des femmes, un élément crucial apparaît bien qu’il soit méconnu. Tous les événements de la vie ont un impact sur le parcours profession­nel d’une femme et très peu sur celui d’un homme. Cela veut dire que la maternité est un frein à la carrière, mais aussi le mariage, le divorce, la maladie d’un proche, le deuil, etc. Bref n’importe lequel des événements de la vie. Faute au Care, répond la littératur­e genre, entendez le soin aux autres, qui toucherait plus les femmes que les hommes. Une anecdote illustre ce propos. Récemment, lors d’une formation, une des participan­tes me dit deux heures avant la fin de l’atelier que sa fille est malade et qu’il faut aller la récupérer à la crèche. Un classique! Son mari lui écrit qu’il ne peut pas car il est en réunion. Elle aurait pu répondre: «Moi non plus, je suis en formation.» Seulement voilà, elle me dit: «Je ne serai pas tranquille si je reste, je préfère aller la chercher maintenant.» L’histoire ne dit pas si son mari a culpabilis­é, mais en revanche les faits sont là: cette participan­te a quitté le cours. C’est ce qu’on appelle le Care. Quant aux femmes ayant choisi de faire carrière, de ne pas avoir d’enfants et qui ont toujours travaillé à plein temps, elles ne sont pas pour autant protégées vis-à-vis du risque de l’inégalité salariale. En conclusion, s’«il suffisait de», il y a belle lurette que cette recette miracle serait appliquée.

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