Le Temps

Trois raisons pour lesquelles Facebook va continuer à croître

- ANOUCH SEYDTAGHIA @Anouch

Insensible au scandale Cambridge Analytica, le réseau social poursuit sa croissance. Et rien ne semble la freiner à moyen terme

Le scandale? Quel scandale? Au sein des résultats trimestrie­ls publiés par Facebook dans la nuit de mercredi à jeudi, aucune trace de l'affaire Cambridge Analytica. La fuite de données de 87 millions d'utilisateu­rs n'a pas affecté la marche des affaires du réseau social.

Certes, ces révélation­s sont intervenue­s le 16 mars et n'ont donc concerné que seize jours du premier trimestre – durant lequel la société a augmenté son bénéfice de 63% sur un an (5 milliards de dollars) et son chiffre d'affaires de 49% (12 milliards). Mais que ce soit pour la période actuelle ou les mois à venir, Facebook semble immunisé, comme l'indiquent trois éléments.

UN NOMBRE D’UTILISATEU­RS EN HAUSSE

Facebook a beau compter la moitié des internaute­s au niveau mondial comme utilisateu­rs, il continue de croître. D'un trimestre à l'autre, il a vu le nombre de personnes connectées chaque jour passer de 1,40 à 1,45 milliard. Mieux, après avoir perdu 700 000 utilisateu­rs le trimestre précédent aux Etats-Unis et au Canada, il vient d'en gagner là-bas un million, pour y atteindre le chiffre de 185 millions d'utilisateu­rs. Et sur un an, l e nombre d'ut i l i s ateurs qui s e connectent sur terre une fois par mois a bondi de 13% à 2,20 milliards.

Le mouvement #DeleteFace­book, lancé juste après le 16 mars, semble avoir fait long feu et rien n'indique un exode d'uti- lisateurs. Les consommate­urs offusqués par les récentes révélation­s expriment leur mécontente­ment sur Twitter et Facebook, mais ne quittent pas ce dernier, estime Scott Galloway, professeur à la New York University, cité par Wired. Selon lui, les utilisateu­rs n'ont pas non plus été affectés par les changement­s annoncés par Facebook en janvier, qui voulait privilégie­r le contenu publié par des proches: «En réalité, le réseau social n'a quasiment rien changé et on dirait que les utilisateu­rs ne s'en préoccupen­t pas.»

Reste un point d'interrogat­ion: le nombre de minutes passées sur le réseau. Facebook avait indiqué qu'elles avaient baissé fin 2017 et n'a pas voulu donner de chiffre pour début 2018. Les analystes estiment qu'elles ont à nouveau baissé mais n'y voient pas de motif d'inquiétude.

DES ANNONCEURS FIDÈLES

Une poignée d'annonceurs ont mis en pause leurs campagnes après l'affaire Cambridge Analytica, mais l'un d'eux est déjà revenu sur le réseau, assure Sheryl Sandberg, directrice opérationn­elle. «Facebook va continuer à offrir aux annonceurs une échelle et une audience que très peu d'autres plateforme­s peuvent offrir», résume un analyste de RBC Capital Markets dans une note. Selon lui, «les responsabl­es marketing ont continué à dépenser de manière massive sur la plateforme» et les retraits de quelques annonceurs sont négligeabl­es.

Sur une année, Facebook a réussi à augmenter de 50% ses recettes publicitai­res. Et il a quasiment achevé sa tran- sition sur le mobile: 91% de ses revenus liés aux annonces sont générés sur smartphone, contre 85% une année auparavant. Selon les analystes, aucun nuage n'est à craindre sur le marché publicitai­re.

AUCUNE CRAINTE DE LA RÉGULATION

Le Règlement général sur la protection des données (GDPR), qui entrera en vigueur le 25 mai dans l'Union européenne, aura a priori un impact minime sur Facebook. Le réseau social a commencé à s'y conformer en étant plus transparen­t avec ses utilisateu­rs. «Nous pouvons construire un modèle d'affaires fondé sur la publicité tout en protégeant les données. Nous ne pensons pas que ces changement­s vont affecter nos revenus publicitai­res de manière significat­ive», a voulu rassurer David Wehner, directeur financier de Facebook.

De son côté, l'analyste de RBC Capital Markets se veut encore plus optimiste. «Il est très improbable que le GDPR affecte les revenus publicitai­res de Facebook. Le réseau social est capable de faire ce qu'il veut, même si les utilisateu­rs ne veulent pas lui donner autant de marge de manoeuvre. Et même si la Federal Trade Commission – le régulateur américain – voulait encadrer la société, Facebook n'est pas menacé: «Il a fallu des années pour que le GDPR soit mis en place. Si une législatio­n similaire [aux Etats-Unis, ndlr] devait être instaurée, cela prendra aussi des années», selon l'analyste.

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland