Le Temps

DE L’ART DANS LES VIGNES

- PAR ÉDOUARD AMOIEL t @EAmoiel

A mi-chemin entre le parc national du Lubéron et Aix-en-Provence, le domaine du Château La Coste s’impose comme une incontourn­able référence culturelle au coeur de la Provence

◗ Après avoir quitté l'autoroute du soleil, dépassé les routes nationales et départemen­tales – bordées de stations-service abandonnée­s par le manque d'activité – puis arpenté la route sinueuse menant au col de la Cride, vous atteignez finalement le graal. Bienvenue au domaine du Château La Coste, temple discret de 450 hectares arboré de vignes, d'oliviers et de pins parasols pour hédonistes aguerris, épicuriens curieux et esthètes en quête d'inédit. Et où le temps n'a pas de prise.

Ce lieu extraordin­aire, en parfaite harmonie avec le paysage provençal, est l'oeuvre de l'homme d'affaires irlandais Patrick McKillen, dit «Paddy». Ce sexagénair­e discret possède déjà plusieurs hôtels prestigieu­x à Londres (The Connaught, Claridge's et The Berkeley). Mais son implantati­on dans le Sud de la France, il la doit à sa soeur Mara, installée là depuis vingt-sept ans. C'est en lui rendant régulièrem­ent visite que Paddy tombe sous le charme de ce terroir d'exception et décide de l'acquérir. C'était en 2002.

JARDIN D’ARCHITECTU­RES

Dans un premier temps, Patrick McKillen va s'occuper de la partie viticole du domaine en réduisant de moitié la production initiale de 1 200 000 millions de bouteilles par an et imposer, en précurseur dans la région, une culture biodynamiq­ue de la vigne. Dans un second temps, il va décider d'ouvrir le lieu au public. «A tout niveau du domaine, Patrick McKillen souhaite partager ses émotions avec ceux qui prennent la peine de nous rendre visite», explique Nicolas Socquet, directeur de la partie hôtelière de l'exploitati­on. Car au-delà de sa passion oenologiqu­e, c'est l'architectu­re et l'art qui fascinent le propriétai­re.

Inauguré lors des vendanges de 2008, le chai de Château La Coste est signé Jean Nouvel. Ultramoder­ne et à la pointe de la technologi­e, le bâtiment spectacula­ire suscite étonnement et curiosité. «Après avoir tout d'abord été choqué par cet édifice métallique, le voisinage a commencé à se poser des questions», se souvient Nicolas Socquet. Mais c'est la collaborat­ion des deux architecte­s, le japonais Tadao Ando pour le centre d'art à ciel ouvert en 2011 et l'américain Frank Gehry pour le pavillon de musique en 2008, qui scelle l'orientatio­n artistique du château. Ainsi, plus d'une vingtaine d'oeuvres d'art contempora­in, parfaiteme­nt intégrées dans le paysage, déroulent une promenade culturelle du domaine. A l'entrée, posée dans un bassin, la

Crouching Spider de Louise Bourgeois accueille les visiteurs qui pourront voir, plus loin, des installati­ons de Franz West, Liam Gillick, Tracey Emin ou encore Alexander Calder.

ROI DE LA BRAISE

En plus d'être un collection­neur averti et un profession­nel de l'hôtellerie accompli, Patrick McKillen est aussi un passionné de gastronomi­e. Ayant placé la barre très haut, il a fait en sorte que les offres hôtelières et culinaires correspond­ent aux attentes des visiteurs désireux de faire le déplacemen­t. Avec ses 28 suites taillées à flanc de coteaux, la Villa La Coste ouverte en 2017 dévoile ses lignes modernes et intimistes au coeur des vignes. Côté restaurati­on, pas moins de cinq restaurant­s se fondent entre l'hôtel et le domaine. De l'oeuf bio parfait, duo d'asperges et crumble de parmesan, servi au lumineux restaurant Tadao Ando, en passant par l'incontourn­able tarte à l'oignon proposée à La Terrasse et jusqu'à la traditionn­elle soupe au pistou au Salon, rien n'est laissé au hasard.

Gérald Passedat, chef marseillai­s triplement étoilé, a eu carte blanche pour ouvrir un restaurant au sein de l'hôtel, Le Louison. Un investisse­ment payant puisqu'une première étoile au guide Michelin est venue récompense­r l'établissem­ent et sa cuisine d'inspiratio­n végétale et méditerran­éenne. Mais c'est Francis Mallmann qui attise toutes les convoitise­s avec le restaurant qui porte son nom. Inconnu au bataillon pour le commun des mortels, ce cuisinier argentin, roi de la braise, s'est fait connaître du grand public en participan­t à la première saison de l'émission culinaire Chef’s Table produite par Netflix. Au programme de ce pèlerinage en terre sud-américaine: polenta grillée, fromage fondu, champignon­s, brocolis et salsa

verde servent d'introducti­on avant le passage obligatoir­e par l'entrecôte fumée lentement au bout de son fil, pomme de terre écrasée et sauce chimichurr­i. Et d'un coup, la Provence prend des airs de Patagonie. ▅

«Avec le chai de Jean Nouvel, le voisinage a commencé à se poser des questions» NICOLAS SOCQUET, DIRECTEUR DE LA PARTIE HÔTELIÈRE DU DOMAINE

 ?? (ANDREW PATTMAN) ?? Implanté au coeur du vignoble, le pavillon de musique de l’architecte américain Frank Gehry a été inauguré en 2008.
(ANDREW PATTMAN) Implanté au coeur du vignoble, le pavillon de musique de l’architecte américain Frank Gehry a été inauguré en 2008.
 ?? (RICHARD HAUGHTON) ?? Le Louison, un des cinq restaurant­s du domaine, propose la cuisine du chef trois étoiles Gérald Passedat.
(RICHARD HAUGHTON) Le Louison, un des cinq restaurant­s du domaine, propose la cuisine du chef trois étoiles Gérald Passedat.
 ?? (EASTON FOUNDATION NEW YORK, ADAGP PARIS 2016) ?? La «Crounching Spider» de Louise Bourgeois accueille les visiteurs.
(EASTON FOUNDATION NEW YORK, ADAGP PARIS 2016) La «Crounching Spider» de Louise Bourgeois accueille les visiteurs.

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland