DE L’ART DANS LES VIGNES
A mi-chemin entre le parc national du Lubéron et Aix-en-Provence, le domaine du Château La Coste s’impose comme une incontournable référence culturelle au coeur de la Provence
◗ Après avoir quitté l'autoroute du soleil, dépassé les routes nationales et départementales – bordées de stations-service abandonnées par le manque d'activité – puis arpenté la route sinueuse menant au col de la Cride, vous atteignez finalement le graal. Bienvenue au domaine du Château La Coste, temple discret de 450 hectares arboré de vignes, d'oliviers et de pins parasols pour hédonistes aguerris, épicuriens curieux et esthètes en quête d'inédit. Et où le temps n'a pas de prise.
Ce lieu extraordinaire, en parfaite harmonie avec le paysage provençal, est l'oeuvre de l'homme d'affaires irlandais Patrick McKillen, dit «Paddy». Ce sexagénaire discret possède déjà plusieurs hôtels prestigieux à Londres (The Connaught, Claridge's et The Berkeley). Mais son implantation dans le Sud de la France, il la doit à sa soeur Mara, installée là depuis vingt-sept ans. C'est en lui rendant régulièrement visite que Paddy tombe sous le charme de ce terroir d'exception et décide de l'acquérir. C'était en 2002.
JARDIN D’ARCHITECTURES
Dans un premier temps, Patrick McKillen va s'occuper de la partie viticole du domaine en réduisant de moitié la production initiale de 1 200 000 millions de bouteilles par an et imposer, en précurseur dans la région, une culture biodynamique de la vigne. Dans un second temps, il va décider d'ouvrir le lieu au public. «A tout niveau du domaine, Patrick McKillen souhaite partager ses émotions avec ceux qui prennent la peine de nous rendre visite», explique Nicolas Socquet, directeur de la partie hôtelière de l'exploitation. Car au-delà de sa passion oenologique, c'est l'architecture et l'art qui fascinent le propriétaire.
Inauguré lors des vendanges de 2008, le chai de Château La Coste est signé Jean Nouvel. Ultramoderne et à la pointe de la technologie, le bâtiment spectaculaire suscite étonnement et curiosité. «Après avoir tout d'abord été choqué par cet édifice métallique, le voisinage a commencé à se poser des questions», se souvient Nicolas Socquet. Mais c'est la collaboration des deux architectes, le japonais Tadao Ando pour le centre d'art à ciel ouvert en 2011 et l'américain Frank Gehry pour le pavillon de musique en 2008, qui scelle l'orientation artistique du château. Ainsi, plus d'une vingtaine d'oeuvres d'art contemporain, parfaitement intégrées dans le paysage, déroulent une promenade culturelle du domaine. A l'entrée, posée dans un bassin, la
Crouching Spider de Louise Bourgeois accueille les visiteurs qui pourront voir, plus loin, des installations de Franz West, Liam Gillick, Tracey Emin ou encore Alexander Calder.
ROI DE LA BRAISE
En plus d'être un collectionneur averti et un professionnel de l'hôtellerie accompli, Patrick McKillen est aussi un passionné de gastronomie. Ayant placé la barre très haut, il a fait en sorte que les offres hôtelières et culinaires correspondent aux attentes des visiteurs désireux de faire le déplacement. Avec ses 28 suites taillées à flanc de coteaux, la Villa La Coste ouverte en 2017 dévoile ses lignes modernes et intimistes au coeur des vignes. Côté restauration, pas moins de cinq restaurants se fondent entre l'hôtel et le domaine. De l'oeuf bio parfait, duo d'asperges et crumble de parmesan, servi au lumineux restaurant Tadao Ando, en passant par l'incontournable tarte à l'oignon proposée à La Terrasse et jusqu'à la traditionnelle soupe au pistou au Salon, rien n'est laissé au hasard.
Gérald Passedat, chef marseillais triplement étoilé, a eu carte blanche pour ouvrir un restaurant au sein de l'hôtel, Le Louison. Un investissement payant puisqu'une première étoile au guide Michelin est venue récompenser l'établissement et sa cuisine d'inspiration végétale et méditerranéenne. Mais c'est Francis Mallmann qui attise toutes les convoitises avec le restaurant qui porte son nom. Inconnu au bataillon pour le commun des mortels, ce cuisinier argentin, roi de la braise, s'est fait connaître du grand public en participant à la première saison de l'émission culinaire Chef’s Table produite par Netflix. Au programme de ce pèlerinage en terre sud-américaine: polenta grillée, fromage fondu, champignons, brocolis et salsa
verde servent d'introduction avant le passage obligatoire par l'entrecôte fumée lentement au bout de son fil, pomme de terre écrasée et sauce chimichurri. Et d'un coup, la Provence prend des airs de Patagonie. ▅
«Avec le chai de Jean Nouvel, le voisinage a commencé à se poser des questions» NICOLAS SOCQUET, DIRECTEUR DE LA PARTIE HÔTELIÈRE DU DOMAINE