Xylouris White, loin des yeux, près du choeur
CONCERT Le duo australo-crétois Xylouris White produit une musique hybride et explosive. A expérimenter ce mercredi à la Cave 12 de Genève
D’Héraklion à Canberra, comptez à peu près 15409 kilomètres. On serait tenté de placer le même éloignement entre le luth de Georgios Xylouris et la batterie de Jim White: pourtant, lorsque le Crétois et l’Australien se sont rencontrés pour la première fois à Melbourne, c’était en 1990, les distances se sont abolies en une forme de coup de foudre artistique.
De l’héritage de son île, Georgios Xylouris est à la fois un passeur et un rénovateur – entre autres parce qu’il a fait migrer son instrument, le laouto (la variante insulaire du luth), de la fonction d’accompagnateur à celle de soliste. Jim White, lui, est un dynamiteur du rock que l’on peut voir à l’oeuvre dans son projet Dirty Three (avec Warren Ellis et Mick Turner) ou dans le dos de sorciers du calibre de Nick Cave ou PJ Harvey.
Crète byzantine
Improbable sur le papier, la rencontre de ces deux univers allume pourtant un feu d’artifice. Que l’on jette par exemple l’oreille à Black Peak, album que le duo a fait paraître chez Bella Union en 2016: à la voix et par les doigts, Xylouris gravit et dévale des montagnes – et White cravache derrière lui. Le substrat de leurs compositions est bien entendu à chercher dans cette Crète toujours un peu byzantine – le laouto remplissant ici tout à fait son rôle de géolocalisation.
Pièces crépusculaires
Mais les réinterprétations de cette part d’Orient sont larges, et souvent tributaires du type de martèlement choisi par White: on pourra ainsi entendre des constructions râpeuses, abrasives, furieuses, et d’autres qui s’improvisent sur des tempos continuellement changeants. On trouvera aussi quelques fois des pièces beaucoup plus crépusculaires – des introspections nourries de réverbérations lointaines. Et d’autres encore qui, par on ne sait trop quel effet collatéral, orientent curieusement le propos vers le finger picking des Appalaches. Bref: les noces de Minos et du Grand Kookaburra produisent de beaux enfants étranges.
Cave 12, rue de la Prairie 4, Genève. Me 16 à 21h. www.cave12.org