Le Temps

Xylouris White, loin des yeux, près du choeur

- PHILIPPE SIMON Xylouris White.

CONCERT Le duo australo-crétois Xylouris White produit une musique hybride et explosive. A expériment­er ce mercredi à la Cave 12 de Genève

D’Héraklion à Canberra, comptez à peu près 15409 kilomètres. On serait tenté de placer le même éloignemen­t entre le luth de Georgios Xylouris et la batterie de Jim White: pourtant, lorsque le Crétois et l’Australien se sont rencontrés pour la première fois à Melbourne, c’était en 1990, les distances se sont abolies en une forme de coup de foudre artistique.

De l’héritage de son île, Georgios Xylouris est à la fois un passeur et un rénovateur – entre autres parce qu’il a fait migrer son instrument, le laouto (la variante insulaire du luth), de la fonction d’accompagna­teur à celle de soliste. Jim White, lui, est un dynamiteur du rock que l’on peut voir à l’oeuvre dans son projet Dirty Three (avec Warren Ellis et Mick Turner) ou dans le dos de sorciers du calibre de Nick Cave ou PJ Harvey.

Crète byzantine

Improbable sur le papier, la rencontre de ces deux univers allume pourtant un feu d’artifice. Que l’on jette par exemple l’oreille à Black Peak, album que le duo a fait paraître chez Bella Union en 2016: à la voix et par les doigts, Xylouris gravit et dévale des montagnes – et White cravache derrière lui. Le substrat de leurs compositio­ns est bien entendu à chercher dans cette Crète toujours un peu byzantine – le laouto remplissan­t ici tout à fait son rôle de géolocalis­ation.

Pièces crépuscula­ires

Mais les réinterpré­tations de cette part d’Orient sont larges, et souvent tributaire­s du type de martèlemen­t choisi par White: on pourra ainsi entendre des constructi­ons râpeuses, abrasives, furieuses, et d’autres qui s’improvisen­t sur des tempos continuell­ement changeants. On trouvera aussi quelques fois des pièces beaucoup plus crépuscula­ires – des introspect­ions nourries de réverbérat­ions lointaines. Et d’autres encore qui, par on ne sait trop quel effet collatéral, orientent curieuseme­nt le propos vers le finger picking des Appalaches. Bref: les noces de Minos et du Grand Kookaburra produisent de beaux enfants étranges.

Cave 12, rue de la Prairie 4, Genève. Me 16 à 21h. www.cave12.org

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