Affaire Maudet: le risque d’emballement
L’affaire Maudet est en train de démontrer la difficulté de faire de la politique de manière apaisée dans le canton de Genève.
Le conseiller d’Etat a commis une bourde en acceptant d’être invité à un voyage à Abu Dhabi. Sa communication à ce sujet a été pour le moins maladroite. Avant d’admettre une imprudence, il a tardé à s’expliquer complètement sur sa situation, ce qui a nourri toutes sortes de suspicions et fait monter la pression. La maladresse devenant alors, dans la perception de certains, une erreur, voire une faute.
A moins de nouvelles révélations, il convient toutefois de s’interroger sur l’emballement à l’oeuvre au bout du lac. Après les élections au Conseil d’Etat où le même Pierre Maudet a triomphé – seul élu au premier tour – tout le monde espérait une législature apaisée. C’est raté.
Alors que les négociations pour la présidence de l’exécutif s’enclenchent, le nouveau gouvernement cantonal semble mal parti. MCG et Verts tentent de profiter de la crise pour placer les leurs. Pierre Maudet a-t-il d’ores et déjà perdu la présidence du Conseil d’Etat? Résultat des courses cette semaine sûrement.
La rencontre, après ce long week-end, des membres du collège servira surtout à déterminer s’il y a une volonté de travailler ensemble pour le canton et de resserrer les rangs autour de l’un des leurs. Ou, au contraire, si des visions partisanes sont à l’oeuvre, au risque de bloquer la dynamique espérée.
Pierre Maudet a-t-il laissé une partie de sa crédibilité dans cette affaire? L’enquête de la justice dira si les circonstances autour du fameux voyage correspondent à un conflit d’intérêts ou, pire, à «l’acceptation d’un avantage» au sens pénal. En parallèle, toutes les rédactions de Suisse continuent de travailler sur d’éventuelles autres imprudences du conseiller d’Etat.
Mais il faudra aller plus loin que de simples coïncidences de dates pour établir de nouveaux faits. Car personne n’a encore été capable de démontrer un lien entre le voyage à Abu Dhabi du politicien et l’attribution d’un marché public de l’aéroport.
A ce stade, un Pierre Maudet formidablement populaire – et cela compte en politique – reste le meilleur atout pour son canton. Si ce lien persiste entre lui et la population, rien n’indique qu’il soit empêché de quelque manière de continuer d’exercer son mandat, et même d’espérer faire de la politique à l’avenir au niveau fédéral.
Au-delà de l’éventuelle accession à la présidence de Genève, un autre test sera pour lui la votation cantonale du 10 juin. Celle-ci doit – dans la foulée de la nouvelle loi sur la police – mettre fin à certains avantages quant aux droits à la retraite de cette corporation, qui pèse lourd dans la vie politique locale. Une acceptation sans nuance du texte prouverait que la légitimité du conseiller d’Etat n’a pas été entachée par cette crise.
A ce stade, un Pierre Maudet formidablement populaire reste le meilleur atout pour son canton