Mark Zuckerberg sermonné à Bruxelles
Le patron de Facebook était entendu par le Parlement européen pour gérer les suites de l’affaire Cambridge Analytica. Mark Zuckerberg a fait son mea culpa, mais demandé de la patience aux autorités européennes.
Suite au scandale Cambridge Analytica, le patron de Facebook était très attendu mardi soir à Bruxelles. Sommé par le Parlement européen de remédier aux défaillances du réseau social, il a promis de nouveaux investissements dans la sécurité
Il faudra encore du temps pour que Facebook répare tous ses dysfonctionnements mais le réseau social progresse et tous les investissements seront faits «pour rectifier le tir». Un mois après une première audition à Washington, c’est l’assurance que Mark Zuckerberg est venu donner mardi soir à Bruxelles aux représentants du Parlement européen qui l’avaient sommé de venir s’expliquer sur le dernier scandale Cambridge Analytica, cette société britannique ayant détourné des millions de données pour en étudier les tendances politiques. Dans l’Union européenne (UE), 2,7 millions d’Européens seraient concernés.
Passage obligé: l’Américain a présenté ses excuses, concédant que le réseau n’a pas été assez rapide à «empêcher la campagne de désinformation» et la «propagande russe» pendant les élections américaines de 2016, ni à empêcher l’utilisation du réseau «à des fins nuisibles». «C’est une erreur, je le regrette et je m’en excuse», a d’emblée affirmé le patron de Facebook.
Batterie de questions
Lors de cette audition d’environ une heure, initialement prévue à huis clos et finalement retransmise en direct, Mark Zuckerberg avait face à lui des députés très calmes mais très précis sur leurs demandes: Facebook est-elle une plateforme neutre? Mark Zuckerberg peut-il garantir qu’aucun autre scandale de détournement des données ne se reproduira? L’UE doit-elle accepter que Facebook constitue un monopole? Et comme l’a résumé le Belge libéral Guy Verhofstadt: quelle empreinte l’Américain veut-il laisser dans l’histoire? Celle d’un Bill Gates ou d’un Steve Jobs ou celle d’un «génie ayant créé une hydre qui a détruit nos données»?
Dans son propos liminaire, le patron et cofondateur du réseau social a énuméré tout ce que son entreprise fait pour renforcer la sécurité des utilisateurs. Un nouveau moteur de recherche permettra ainsi de supprimer tout l’historique de navigation ainsi que les cookies. Les applications, directement au coeur du scandale Cambridge Analytica, sont toutes passées en revue et 200 ont déjà été suspendues. Une application ne sera plus active et les données collectées supprimées après trois mois d’inactivité. Le nombre de données collectées par les app sera également revu à la baisse.
Contre les fake news, 30000 faux comptes ont déjà été supprimés en France rien qu’en 2017. L’Américain a aussi annoncé un système de détecteur et «vérificateur» de nouvelles même s’il estime que ces fake news sont plus des «spams» motivés économiquement que de véritables tentatives de peser idéologiquement.
Mark Zuckerberg savait très bien en venant à Bruxelles que l’UE se dotera dès ce vendredi 25 mai d’un règlement renforcé sur la protection des données personnelles, son Règlement général
A Bruxelles, Mark Zuckerberg a promis de donner davantage de pouvoir aux utilisateurs dans le consentement et le contrôle de leurs données
de protection des données (RGPD), elle qui a déjà commencé à se poser des questions sur Facebook en 2013 dans la foulée des révélations d’Edward Snowden. C’est aussi à cause de Facebook, attaqué par l’activiste autrichien Max Schrems, que la Commission a dû abandonner en 2014 sa décision d’adéquation transatlantique (Safe Harbor) pour lui substituer le cadre plus sûr du Privacy Shield qui permet notamment à Facebook d’opérer en Europe.
Dans cette optique, Mark Zuckerberg a promis de donner davantage de pouvoir aux utilisateurs dans le consentement et le contrôle de leurs données. «Une équipe conséquente travaille à respecter la loi», a-t-il assuré. L’Américain a aussi insisté sur les investissements que l’entreprise compte faire en Europe, avec de nouveaux moyens sur l’intelligence artificielle, des centres de recherche en Suède ou bientôt au Danemark et des emplois à la clef pour renforcer la surveillance du réseau. Une façon subtile de contourner à la fois les questions sur son monopole et celles sur le degré d’imposition de Facebook dans les pays européens.
A-t-il séduit ses auditeurs? Certains ne cachaient pas leur frustration après cette rencontre, trop courte dans son format pour répondre à tout. Mais l’Américain devait partir (il sera à Paris ce mercredi) et finira de leur répondre par écrit.
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