Le Temps

«Pour des quotas féminins»

Le PDC traverse une zone de turbulence­s agitée de soubresaut­s internes entre les ailes conservatr­ice et libérale. La promotion des femmes en politique divise également. Le décryptage de la présidente des femmes du parti, Babette Sigg

- PROPOS RECUEILLIS PAR BORIS BUSSLINGER, BERNE @BorisBussl­inger

Démission de femmes parlementa­ires opposées à la politique conservatr­ice du président Gerhard Pfister, refus de députés masculins d’appuyer l’égalité salariale: le fossé entre les genres se creuse au sein du PDC suisse. Pour la présidente des femmes du parti, Babette Sigg, la promotion des femmes en politique pourrait passer par les quotas. Elle s’en explique au Temps.

Le PDC vit des heures difficiles: démissions de femmes parlementa­ires opposées à la politique conservatr­ice du nouveau président Gerhard Pfister, refus de parlementa­ires masculins d'appuyer l'égalité salariale, harcèlemen­t sexuel, le fossé des genres semble se creuser et les résultats électoraux font grise mine. Interrogée dimanche par la NZZ am Sonntag, Doris Leuthard s'exprimait contre l'introducti­on de quotas en politique. La présidente des femmes de son parti, Babette Sigg, tient le discours inverse.

Pourquoi une fraction féminine? Les femmes voient les choses différemme­nt. Un groupe de femmes leur permet de s'exprimer de manière plus libre, avec moins de pression qu'au sein du parti général. Nous abordons cependant tous les thèmes, y compris l'armée ou les finances. Il est nécessaire d'être attentives à ne pas se retrouver cantonnées aux questions de politique familiale. En tant que présidente, quelle est votre fonction, soutenir les femmes? Quand j'entends ça, je deviens folle. Les femmes ne sont pas de petites plantes fragiles qui doivent être arrosées pour pouvoir se développer. C'était peut-être le cas il y a quarante ans, lorsque nous avons enfin obtenu le droit de vote, mais ça a changé. Mon rôle est avant tout d'ouvrir les portes aux femmes, de leur offrir une plateforme au sein du PDC, de leur donner du courage et de créer de la cohésion entre elles.

Doris Leuthard peut-elle être remplacée par un homme à son départ? Le ou la meilleure doit être élu(e). Mais ce serait mieux qu'elle soit remplacée par une femme. Il n'est pas envisageab­le qu'il ne reste qu'une seule femme au sein du Conseil fédéral. Nous représento­ns plus de la moitié de la population! On ne peut en outre plus dire qu'il n'y a pas assez de femmes. Il y en a et elles sont tout à fait compétente­s. Nous souhaitons que Mme Leuthard soit remplacée par une politicien­ne ouverte, libérale et sociale. Je n'ai pas le droit de vous donner des noms pour le moment, mais j'en

Babette Sigg, présidente des Femmes PDC: «Nous aimerions que le sexe soit pris en compte comme le sont les régions et la langue.»

ai en tête. Toutefois, nous préférerio­ns encore ne pas devoir discuter de ça et que notre conseillèr­e fédérale actuelle reste en poste.

Devrait-on introduire des quotas au sein du Conseil fédéral ou du parlement? Pendant longtemps, j'ai été contre les quotas. Mais je ne comprends désormais plus les femmes qui disent «je ne veux pas être élue grâce aux quotas». Je préfère de loin être présente là où se décident les choses, quelle que soit la manière d'y arriver, plutôt que de rester à l'écart. Les quotas ne sont pas populaires, mais c'est peut-être l'unique moyen d'arriver à des résultats. En ce qui concerne le Conseil fédéral, ce n'est pas tant de quotas que de concordanc­e qu'il faut parler. Ignazio Cassis a été élu parce qu'il est Tessinois, Guy Parmelin parce qu'il est Romand. Nous aimerions que le sexe soit pris en compte comme le sont les régions et la langue.

Plusieurs femmes de votre parti se sont retirées de la politique ces derniers temps. Y a-t-il un problème de genre au sein du PDC? Je ne pense pas, je suis même convaincue du contraire. Notre nouveau président, Gerhard Pfister, est différent de son prédécesse­ur Christophe Darbellay, mais notre parti continue d'avancer, en défendant la famille de manière centriste et ouverte. Que tous ces

«Je préfère être présente là où se décident les choses, quelle que soit la manière d’y arriver, plutôt que de rester à l’écart»

profils différents se retrouvent sous la bannière d'un même parti est une chose formidable.

Une famille moderne voudrait toutefois que les membres du couple bénéficien­t du même salaire. Or la loi sur l’égalité salariale a été refusée par certains hommes PDC. Comment l’avez-vous vécu? Je n'arrive pas à mettre des mots sur ce sujet…

Vous désiriez augmenter la part des femmes PDC au parlement en 2019. Que prévoyez-vous de faire? Ce qui me choque, c'est que certains cantons disposent de politicien­nes mais n'en présentent aucune lors de votations parce qu'aucune d'entre elles n'a accepté de participer aux listes. C'est vraiment grave! Je ne sais pas si c'est un problème sociétal ou autre chose, je ne me l'explique pas. Il y a une génération de femmes qui arrive en ce moment et qui n'a pas connu tous les débats autour des questions d'égalité, que ça ne tente pas de se mettre en avant. Il ne s'agit pourtant pas non plus de devenir présidente des Etats-Unis! Sans volontaire­s, même des quotas sont inutiles.

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(BÉATRICE DEVÈNES POUR LE TEMPS)

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