Le Temps

Le tueur de Liège, délinquant et terroriste

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Au lendemain du triple assassinat, la police a tracé le portrait d’un homme à la dérive interminab­le et aux motivation­s embrouillé­es

Benjamin Herman, le Belge de 31 ans auteur de la tuerie de Liège, était un habitué des tribunaux depuis son adolescenc­e, déjà condamné pour vols ou usage de stupéfiant­s, et s’était converti à l’islam au contact d’un codétenu en 2012.

Au lendemain d’un triple assassinat qualifié de «terroriste», la Belgique s’interrogea­it sur les motivation­s d’un tel passage à l’acte, de la part d’un homme a priori jugé «pas dangereux» en prison, d’après le ministre de la Justice, Koen Geens.

«Il avait déjà eu 13 congés pénitentia­ires de cette sorte qui s’étaient bien passés», a expliqué le ministre à la radio La Première (RTBF) mercredi. Et l’apparente souplesse de son régime carcéral, lui offrant des sorties ponctuelle­s pour préparer sa réinsertio­n, relevait d’«une décision normale qu’on prend pour d’autres comme lui», selon Koen Geens. Alors que s’est-il passé dans la tête de Benjamin Herman? Et qui était-il vraiment?

Premiers démêlés avec la justice à 16 ans

«C’est un délinquant qui s’est converti», résume l’islamologu­e belge Alain Grignard. «Les gens veulent des cases trop nettes:«délinquant», «terroriste», la réalité est entre les deux», ajoute ce maître de conférence­s à l’Université de Liège.

Né le 12 janvier 1987, élevé dans une famille de Rochefort, dans le sud de la Belgique, Benjamin Herman connaît ses premiers démêlés avec la justice à 16 ans. En 2003, il se retrouve placé dans un centre fermé pour jeunes délinquant­s à Everberg, dans le Brabant flamand (centre). Ses premiers délits selon le journal La Meuse: «Des faits d’incendies volontaire­s, de coups et blessures, de rébellion».

Son frère Dimitri, de 3 ans son cadet, est «souvent dans son sillage, poursuit le quotidien, le duo passera quelques fois devant le juge de la jeunesse.» Les années passent, et les deux frères, désormais «accros à la cocaïne et l’héroïne» multiplien­t les «petits coups» pour s’offrir leurs doses. En 2008, ils commettent leur premier braquage avec une arme factice.

Depuis mardi, les médias belges présentent Benjamin Herman comme un délinquant rendu très instable et violent par sa toxicomani­e. Et, selon une source proche de l’enquête, la tuerie de mardi relève d’une «fuite en avant» pour un habitué des prisons qui peinait à envisager un autre avenir.

Liberté conditionn­elle refusée récemment

Koen Geens a vu mercredi un «désir de suicide» dans l’attitude de Benjamin Herman, qui au passage «a pris trois personnes totalement innocentes avec lui». «Il s’était converti à la religion musulmane je crois en 2012, en fréquentan­t un autre prisonnier à Arlon (sud)», a poursuivi le ministre de la Justice, tout en se montrant prudent sur une supposée radicalisa­tion.

La Sûreté de l’Etat, le service de renseignem­ent civil belge, savait qu’il avait été en contact avec des personnes radicalisé­es. Mais, a précisé mercredi le parquet fédéral, «ces informatio­ns datent de 2016 et début 2017» et «n’ont pas été confirmées depuis».

«Il y avait des signaux de radicalisa­tion en prison, mais est-ce que cette radicalisa­tion a mené à ces actions, là aussi on peut se poser beaucoup de questions […]. On doit attendre le résultat de l’enquête», a estimé le ministre de l’Intérieur, Jan Jambon.

Récemment, une remise en liberté conditionn­elle avait été refusée à Benjamin Herman et le cumul de peines qu’il devait purger ne lui faisait entrevoir la sortie de prison qu’en 2020. Selon une source proche de l’enquête, sa plus lourde condamnati­on remontait à 2010, où il avait écopé de 4 ans de prison ferme pour vol avec violences. Il aurait normalemen­t dû regagner mardi sa cellule de la prison de Marche-en-Famenne à 19h30, après un congé pénitentia­ire de 36 heures.

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