Exonération immorale pour des gains immoraux
La loi fédérale soumise au vote le 10 juin introduit la généralisation de l’exonération fiscale des gains dans les jeux d’argent. Il est légitime de se demander pourquoi le législateur n’a pas choisi au contraire de généraliser l’imposition de ces revenus. Il s’est laissé influencer par le Conseil fédéral et par ses arguments peu pertinents. L’inégalité de traitement actuelle entre les gains à la loterie et ceux au casino aurait pu être corrigée par une taxation des deux types de gains. La difficulté de calculer la taxation n’est pas un argument valable pour y renoncer. Le risque d’une éventuelle perte de marché pour les exploitants suisses du jeu d’argent n’a rien de moralement négatif. La loi actuelle sur les loteries pose le principe que «les loteries sont prohibées» même si elle prévoit ensuite des exceptions. C’est dire qu’elle retient d’emblée leur caractère malsain et dangereux. Le jeu dans les casinos évoque des situations dramatiques de joueurs, telles que décrites par Dostoïevski et Stefan Zweig. Nous sommes donc loin d’une industrie morale. Il est déraisonnable que l’Etat veuille ici se retirer fiscalement alors qu’il s’applique à intervenir à large échelle dans tous les cas de transferts d’argent obtenu dans la moralité. En plus de la fiscalité frappant les revenus du travail et de la fortune, il y a aussi notamment celle des montants touchés à titre d’héritage ou de donation. Dans le canton de Neuchâtel, si le bénéficiaire n’avait pas de lien de mariage ou de parenté avec le défunt, il subit une taxation fiscale confiscatoire de 45% pour toute somme de plus de 10000 francs. Il est hautement choquant que pour 50000 francs, par exemple, il n’y ait pas d’impôt si c’est un gain à la loterie, mais qu’il y en ait un de 22500 francs s’il s’agit d’un legs de la part d’un ami.
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