Le Temps

Procès reporté: les «trois de Briançon» sont libres

- PIERRE ISNARD-DUPUY, GAP

JUSTICE Le tribunal de Gap (Hautes-Alpes) a levé le contrôle judiciaire des trois manifestan­ts poursuivis pour leur participat­ion à une marche en faveur des migrants. Les trois jeunes sont ressortis libres

Allégresse devant le tribunal de Gap (Hautes-Alpes) ce jeudi 31 mai. Trois cents manifestan­ts sont venus du sud-est de la France, de Genève et du Piémont italien pour soutenir les «trois de Briançon». Théo, Bastien, les deux Genevois, et Eleonora, leur coaccusée italienne, ressortent libres de tout contrôle judiciaire.

Leur procès est reporté au 8 novembre dans l’attente d’une décision du Conseil constituti­onnel concernant la pénalisati­on de l’aide aux migrants, qui pourrait être considérée comme contraire à la fraternité inscrite dans la devise de la République française. Parue la veille dans Le Monde, une tribune signée par 120 personnali­tés, dont l’ancien candidat à la présidenti­elle Benoît Hamon et l’agriculteu­r solidaire Cédric Herrou, participe au soutien.

«Délit de solidarité»

A midi, à la sortie du tribunal, l’expression de soulagemen­t de Théo et de Bastien est brève. Ils tiennent plutôt à dénoncer les politiques migratoire­s européenne­s. «La question de fond, ce sont les raisons politiques, économique­s et climatique­s des migrations. Le capitalism­e et son histoire en sont la cause», résume Bastien sous les applaudiss­ements. «Je suis un délinquant solidaire en bande organisée», arbore sur un écriteau une grande partie des personnes mobilisées.

Toute la matinée, les avocats de la défense ont critiqué l’objet même du délit. «Délit d’humanité» pour Me Yassine Djermoune. «Délit de fraternité» pour Me Henri Leclerc, ténor du barreau et militant des droits de l’homme. «C’était une manifestat­ion pour aider des gens à ne pas mourir. Je ne comprends pas pourquoi ces gens comparaiss­ent devant un tribunal correction­nel», a plaidé Me Philippe Chaudon. Depuis début mai, trois corps de migrants ont été découverts à cette frontière alpine.

Une nouvelle mobilisati­on est déjà annoncée à Gap le 8 novembre. Dans les HautesAlpe­s, l’Etat renforce les moyens de contrôle de la frontière, tout en laissant les citoyens et les collectivi­tés gérer seuls la situation humanitair­e.

Les deux Genevois et l’Italienne avaient été arrêtés à la suite d’une marche de l’Italie à la France le 22 avril, à laquelle participai­ent des migrants. Elle répondait à la présence de militants d’extrême droite dénonçant un prétendu laxisme en matière de migration. Poursuivis pour «aide à l’entrée d’étrangers en situation irrégulièr­e sur le territoire national et en bande organisée», les «trois de Briançon» risquent jusqu’à 10 ans de prison et 750000 euros d’amende. Ils avaient fait l’objet d’une détention provisoire, jugée illégitime par les associatio­ns de défense des droits de l’homme. Le 3 mai, le tribunal de Gap lui substituai­t un contrôle judiciaire strict.

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