Eglises: un diagnostic lacunaire
Le diagnostic que pose l’éditeur Pierre-Marcel Favre à propos de ce qu’il appelle la désaffectation des églises, notamment catholiques, me paraît fort partial et lacunaire. De son point de vue, inspiré du livre de Guillaume Cuchet Comment notre monde a cessé d’être chrétien, la cause de ce qu’il appelle «l’effondrement» actuel se situerait dans l’ouverture au monde du concile Vatican II (1962-1965). Si cette thèse unilatérale était vraie, comment expliquer que le catholicisme et les vocations sacerdotales et laïques soient de nos jours en croissance, si l’on considère l’ensemble de la planète? C’est la même liturgie dans les langues locales (et plus seulement en latin), c’est le même rituel conservé dans sa richesse à travers les siècles et mis au goût du jour qui sont célébrés en Asie, en Afrique, en Amérique du Sud, là où les communautés catholiques manifestent une belle vitalité. Si le raisonnement de P.-M. Favre était correct, la partie des fidèles attachés aux pratiques traditionnelles devrait être immensément plus grande. Or les membres de la Fraternité Saint-Pie X ne sont qu’une poignée et leur nombre ne va pas du tout en augmentant. C’est une crise spirituelle de l’Occident chrétien, caractérisée par un individualisme libéral et consumériste et un idéal de salut technologique et scientiste, dont les phénomènes de mai 1968 ont été le reflet, qui se trouve à la base de l’effondrement de notre civilisation occidentale, dans tous les domaines, pas seulement dans celui du religieux. Le pape François vient d’écrire une exhortation, Réjouissez-vous et soyez dans la joie, dans laquelle il appelle tous les croyants et les hommes de bonne volonté à la sainteté et à la mystique au quotidien. Il s’attaque donc aux racines des maux actuels. Je ne suis de loin pas persuadé que plus de «mysticité, de magie et de hiérarchie» comme autrefois, ainsi que le propose P.-M. Favre, ferait participer davantage les baptisés à la vie des communautés catholiques occidentales. Mais plus de spiritualité et d’enracinement dans la ferveur évangélique, comme c’est le cas dans bien des Eglises catholiques de l’hémisphère sud, d’où vient François.
▅