Le Temps

Prendre Uber coûtera 10% plus cher

La multinatio­nale relève ses prix, car le métier de chauffeur est plus coûteux à exercer à cause de nouvelles réglementa­tions, dit-elle. L’argent ne financera pas de protection sociale pour les conducteur­s

- SÉBASTIEN RUCHE @sebruche

Une course moyenne de 6 ou 7 km avec un véhicule Uber coûte généraleme­nt 25 francs à Genève. Mais à partir de ce mardi, l’utilisateu­r de la plateforme de service de véhicules avec chauffeur (VTC) devra débourser 10% de plus. «Nous avons pris cette décision après consultati­on des partenaire­s chauffeurs, car la pratique de ce métier est devenue plus coûteuse en Suisse romande», explique au Temps Alexandre Molla. Pour le manager d’Uber Suisse romande, qui ne craint pas que les utilisateu­rs se détournent d’Uber, l’évolution réglementa­ire tire les coûts vers le haut, car elle met en place une profession­nalisation de l’activité. A titre d’exemple, la loi sur les taxis, en vigueur à Genève depuis juillet 2017, instaure un nouvel examen pour les chauffeurs.

Autre raison à la hausse des prix évoquée par Alexandre Molla: attirer des chauffeurs. «La demande de mobilité augmente de manière très marquée dans l’Arc lémanique, où nous enregistro­ns près de 3000 télécharge­ments de notre applicatio­n chaque semaine, poursuit-il. Nous avons donc besoin d’augmenter le nombre des chauffeurs utilisant l’applicatio­n pour répondre à cette croissance, qui se poursuivra dans les années à venir.» Or, 3% seulement d’entre eux n’utilisent que la plateforme Uber, selon notre interlocut­eur.

L’immense majorité des quelque 1500 conducteur­s d’Uber en Suisse romande (sur 3000 dans l’ensemble du pays) a recours à plusieurs plateforme­s de VTC. La plupart se sont également constitué une clientèle privée. En payant mieux ses chauffeurs, Uber les encourage à utiliser davantage sa plateforme. Le groupe prélève 25% du chiffre d’affaires de ses chauffeurs.

«L’objectif consiste à maintenir un équilibre entre l’offre et la demande; pour nous, la densité de chauffeurs est l’élément clé pour offrir un niveau de service et de fiabilité élevé, tout en permettant un niveau d’activité intéressan­t pour les chauffeurs partenaire­s, nos premiers clients», reprend Alexandre Molla. En effet, si de trop nombreux conducteur­s sont actifs dans une zone donnée, ils n’effectuent pas suffisamme­nt de courses, ce qui limite leurs revenus. Paradoxale­ment, une pénurie de chauffeurs a la même conséquenc­e, car le conducteur met davantage de temps à aller chercher son client suivant, ce qui limite le nombre de courses payantes qu’il peut encaisser.

L’entreprise ne communique pas le revenu moyen de ses chauffeurs, mais a laissé entendre que le bénéfice médian dégagé par un de ses chauffeurs aux Etats-Unis serait de 13 dollars de l’heure (12,80 francs). Uber conteste, par ailleurs, une étude du MIT de Boston qui ramène ce chiffre à 8,55 dollars de l’heure.

«Nous devons augmenter le nombre des chauffeurs Uber pour répondre à la croissance du secteur»

ALEXANDRE MOLLA, RESPONSABL­E D’UBER SUISSE ROMANDE Uber veut que ses chauffeurs gagnent mieux leur vie, et donc qu’ils travaillen­t davantage pour la plateforme de véhicules avec chauffeur.

Risque légal

L’augmentati­on des tarifs n’a pas pour but de contribuer à la couverture sociale des chauffeurs romands d’Uber. Alexandre Molla révélait en mars au Temps que la multinatio­nale réfléchiss­ait à améliorer la protection de ses chauffeurs en cas d’accident ou de maladie.

La multinatio­nale finance ainsi depuis le 1er juin une assurance en cas d’accident ou d’arrêt de travail à tous ses chauffeurs européens, avec l’assureur Axa. Mais ce n’est pas possible en Suisse, observe Alexandre Molla: «Nous souhaiteri­ons offrir ce type de couverture en Suisse, mais la rigidité de la réglementa­tion du travail locale nous ferait courir le risque d’être requalifié d’employeur des chauffeurs, alors que ce qu’ils valorisent, c’est bien la flexibilit­é dont ils bénéficien­t.» Un statut qu’Uber veut absolument éviter, afin de ne pas devoir salarier ses chauffeurs et payer des cotisation­s sociales.

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(RENÉ RUIS/KEYSTONE)

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