Le Temps

Des élus vaudois appellent à contrer Erdogan

- AÏNA SKJELLAUG @AinaSkjell­aug

Dans l’optique du scrutin anticipé du 24 juin en Turquie, des membres du Parti démocratiq­ue des peuples (HDP), accompagné­s de représenta­nts de la gauche vaudoise, se sont exprimés pour mobiliser l’électorat de Turquie en Suisse et barrer la route au président Erdogan

L’opposition turque cherche à se donner les moyens de barrer la route au président Erdogan, qui a annoncé en avril de cette année que les élections présidenti­elle et législativ­es initialeme­nt prévues en novembre 2019 se tiendraien­t le 24 juin 2018. Jeudi, le Conseil démocratiq­ue kurde de Lausanne et le HDP Europe (Parti démocratiq­ue des peuples), accompagné­s de quatre élus de la gauche vaudoise et lausannois­e, ont appelé à des élections libres et équitables. «Notre gouverneme­nt actuel ignore les droits fondamenta­ux de notre peuple», a plaidé Eyyup Doru, représenta­nt européen du HDP. «Aujourd’hui, plus de 200 000 personnes sont en prison et 400 000 sont privées de droits politiques. C’est dans ces conditions-là que nous menons notre campagne électorale. Nous nous inquiétons pour le juste dépouillem­ent des urnes en Turquie.»

120 000 Turcs en Suisse

La diaspora turque au sens large, binationau­x compris, est évaluée à 5 millions de personnes dans l’Union européenne, dont quelque 2,7 millions en Allemagne, et environ 120 000 en Suisse. Elle constitue la population immigrée la plus étendue en Europe.

En 2017, les Turcs de Suisse avaient fait figure d’exception en rejetant la réforme de la Constituti­on voulue par le président Recep Tayyip Erdogan, contrairem­ent aux diasporas turques de la majorité des pays européens. Mais, la Constituti­on avalisée, ces élections sont particuliè­rement importante­s, car elles marqueront le passage d’un système parlementa­ire à un système présidenti­el ayant pour clé de voûte un chef de l’Etat aux pouvoirs élargis.

Besime Konca, députée destituée de la République de Turquie, présentait jeudi à Lausanne les conditions dans lesquelles son candidat à la présidenti­elle faisait campagne. «Selahattin Demirtas, le principal opposant politique au président Recep Tayyip Erdogan, leader du Parti démocratiq­ue des peuples, lance des appels depuis sa cellule de prison. La presse étant contrôlée par le gouverneme­nt totalitair­e, il mène sa campagne via les réseaux sociaux. Si l’on ne fait rien, ces élections convoquées sous l’état d’urgence seront le point de départ d’un régime hyper-présidenti­el.»

La gauche vaudoise solidaire

Les députés Nicolas Rochat Fernandez (PS), Jean-Michel Dolivo (Solidarité­S), Vincent Keller (POP) et Ilias Panchard, conseiller communal de Lausanne (Les Verts), ont apporté leur entière solidarité au HDP pour la séquence électorale actuelle. «Cette ruée vers les élections semble avant tout un moyen de gagner du temps», avance Jean-Michel Dolivo. «La seule force d’opposition est incarnée aujourd’hui par Selahattin Demirtas, emprisonné. Le HDP se présente aux élections avec des difficulté­s dues à la répression et au climat que le régime arbitraire et dictatoria­l a instauré. Mais il constitue la seule alternativ­e sociale et démocratiq­ue dans ce pays.» Nicolas Rochat Fernandez souligne encore l’esprit d’ouverture de la campagne du HDP, qui a été faite en quatre langues, turc, kurde, arménien et arabe.

Pendant ce temps, le Blick révélait jeudi que le président Erdogan aurait envoyé à ses compatriot­es en Suisse une lettre dans laquelle il les appelle à voter pour lui. «Il y va de l’avenir de la Turquie», a-t-il écrit. Néanmoins, poursuit le quotidien alémanique, certains ont des doutes sur cette lettre et estiment qu’il pourrait s’agir d’un faux.

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