Le Temps

Avec l’Italie, l’obligation de compromis

- RICHARD WERLY @LTwerly

Le réalisme est une condition sine qua non de l’exercice du pouvoir. Le fait qu’Emmanuel Macron et Giuseppe Conte se soient présentés vendredi tout sourire devant les journalist­es, à l’issue de leur première rencontre à l’Elysée, n’est donc pas seulement une affaire d’apparence. Entre Paris et Rome, l’idée d’un désaccord durable, en pleine crise de l’Union européenne sur la question explosive des migrants, n’est pas tenable. Il faut, d’ici au prochain sommet de l’UE à Bruxelles, les 28 et 29 juin, qu’un compromis soit trouvé entre les deux pays, en y associant évidemment l’Allemagne.

Pour le président français, cette obligation est compliquée à accepter. Emmanuel Macron n’a jamais fait mystère de sa proximité avec le grand perdant des dernières élections législativ­es italiennes, Matteo Renzi. L’Elysée, en pleine discussion avec Berlin sur la réforme de la gouvernanc­e de la zone euro, croyait sans doute aussi pouvoir imposer ses vues à son partenaire transalpin, dont les banques plombées par les mauvaises créances ont cruellemen­t besoin d’un soutien communauta­ire si les taux d’intérêt devaient repartir à la hausse. Mais la victoire des formations populistes italiennes est passée par là. D’où la nécessité de désamorcer la crise engendrée par les premières remarques présidenti­elles sur l’«irresponsa­bilité» et le «cynisme» du refus opposé au débarqueme­nt de l’Aquarius par le ministre de l’Intérieur, Matteo Salvini…

Cette étape maintenant franchie, la question est de savoir sur quelles bases l’indispensa­ble compromis peut être obtenu, en incluant la chancelièr­e Angela Merkel, qu’Emmanuel Macron rencontrer­a mardi. Or la réponse tient en deux mots: solidarité et fermeté.

L’Italie, premier pays d’accueil des migrants dans l’UE avec la Grèce, a besoin d’aide concrète de ses partenaire­s européens les plus proches. L’ouverture des ports français serait dès lors un début de réponse, de même que l’engagement de Paris à accepter immédiatem­ent une partie des migrants sauvés en mer. Le volet fermeté est la seconde partie de l’équation. Sans un affichage clair de sa déterminat­ion à faire respecter des critères communs d’asile, et à trouver des solutions pour le renvoi rapide ou différé des migrants déboutés, l’Union européenne ne parviendra jamais à reprendre l’initiative. Sauver les naufragés et ne pas laisser la Méditerran­ée devenir un cimetière est pour la France comme pour l’Italie une responsabi­lité morale incontourn­able. S’entendre sur un cadre commun pour gérer au mieux les flux migratoire­s est, entre les deux pays et pour leurs partenaire­s européens, une urgente exigence.

L’ouverture des ports français serait un début de réponse

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