Le Temps

Des casques qui épient les émotions des travailleu­rs chinois

- EMILY TURRETTINI @textually

Des conducteur­s de train à grande vitesse, des ouvriers et des militaires chinois sont équipés de casques de sécurité capables de déceler tout changement de leur état émotionnel, raconte un article du South China Morning Post. Munis de capteurs légers et sans fil qui peuvent lire et interpréte­r les ondes cérébrales, ces casques transmette­nt les données à des ordinateur­s dotés d’intelligen­ce artificiel­le, qui détectent les pics émotionnel­s – comme la fatigue, l’anxiété ou la colère. Le chef de projet peut ensuite réagir et ajuster le flux de travail en conséquenc­e, afin d’assurer une meilleure productivi­té.

«Un ouvrier émotif à un poste clé peut affecter toute une chaîne de production, mettant en danger sa propre sécurité ainsi que celle des autres», explique Jin Jia, professeur en sciences du cerveau et de psychologi­e cognitive à l’Université de Ningbo. «Lorsque le système émet un avertissem­ent, un responsabl­e peut alors lui accorder un temps de pause ou lui trouver un poste moins critique.» D’abord accueillis avec suspicion par les salariés, qui «craignaien­t qu’on puisse lire dans leurs pensées», rajoute Jin Jia, «les casques ont fini par être acceptés».

La Chine envisage également d’étendre la surveillan­ce émotionnel­le aux pilotes de ligne – avant le décollage – pour déterminer s’ils sont aptes à voler, l’erreur humaine étant responsabl­e de plus de la moitié des accidents d’avion.

Si cette technologi­e est bien connue, la Chine est le premier pays qui la met en pratique à cette échelle et ce, avec l’assentimen­t du gouverneme­nt. Aux Etats-Unis, ses applicatio­ns sont réservées à certains athlètes à l’entraîneme­nt, pour améliorer leurs performanc­es.

Surveiller l’activité des employés est très répandu dans les entreprise­s et de nombreuses mesures ont été mises en place pour analyser leurs performanc­es, traquer leurs déplacemen­ts ou lire leurs messages électroniq­ues. Mais capter les ondes du cerveau pour interpréte­r les changement­s d’humeur d’une personne élève d’un cran le niveau d’invasion de la sphère privée et intime. Cela rappelle la «police de la pensée» imaginée par Orwell dans son roman 1984. Faut-il tout accepter pour garder son emploi? Les Chinois ont-ils même le droit de se poser la question?

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