Le Temps

En «Corée» encore…

- VALÉRIE LEMAIGRE, ÉCONOMISTE EN CHEF, BCGE

Actualités politique et monétaire se sont échangé la vedette la semaine dernière. Si ces deux piliers de décision se doivent d’avoir une complète indépendan­ce dans nos économies, elles sensibilis­ent toutefois des variables similaires et clés pour le pilier économique: les devises et les taux d’intérêt.

Les événements du mois de mai nous ont rappelé que taux de change et prime de risque crédit pays réagissent parfois de façon violente à l’actualité politique. La semaine dernière, le sommet historique du rapprochem­ent entre la Corée du Nord et les Etats-Unis, qui s’est tenu à Singapour, a essentiell­ement défrayé les chroniques médiatique­s sans emporter le dollar ni les taux d’intérêt dans leur enthousias­me.

Les investisse­urs, attentifs le mois dernier aux incertitud­es politiques et géopolitiq­ues, ont attendu sagement les réunions des banques centrales de mercredi et jeudi, respective­ment de la Fed et de la BCE, pour exprimer leur réaction. Et, à l’image des décisions anticipées de politique monétaire de part et d’autre de l’Atlantique, la précision de l’agenda européen a peu suscité de mouvements, peut-être relégué au second plan, le temps d’un match, derrière les écrans de diffusion du lancement de la Coupe du monde de football en Russie.

Qu’à cela ne tienne, les deux principale­s banques centrales ont affirmé la poursuite de leur politique mise en place dans un environnem­ent économique et financier qualifié de solide, même si la montée d’incertitud­es rééquilibr­e la balance des risques. Hausse des taux de 25 points de base aux EtatsUnis et fin du programme de rachats de titres en Europe en décembre prochain avant une remontée des taux probable à l’été 2019 donnent le ton d’une normalisat­ion monétaire bien enclenchée, après avoir atteint, à grands coups de stratégies non convention­nelles, une normalisat­ion de la croissance. Et, si les événements politiques alimentent les incertitud­es, sans crise majeure, leurs effets sur les taux (change et intérêt) restent provisoire­s.

Certes, les investisse­urs sont essoufflés par la course marathonie­nne de 2017 et se rattachent de plus en plus à des signaux de fin de cycle (tels que l’aplatissem­ent de la courbe des taux et du chômage américain ou l’activité débordante des fusions et acquisitio­ns) pour tenter d’être le mieux positionné­s lors du prochain ralentisse­ment. Au contraire, la semaine dernière, ils ont reçu la confirmati­on que les banques centrales n’ont pas encore sifflé la fin de la course.

En «Corée» encore, les ressources des entreprise­s sont alimentées par une activité économique ferme à laquelle les investisse­urs sont sensibles. Ils ont pourtant besoin d’accélérati­on que seules de nouvelles initiative­s pourront inciter ou détruire. Les regards restent donc rivés sur les Etats-Unis, où la manne de surprises ne semble pas épuisée.

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