«Nous ne voulions pas de marchands du temp n’est pas un salon de l’auto catholique»
Une vingtaine de stands seront ouverts jeudi à Palexpo, mais les bénéfices seront marginaux. Organisateur de la messe, le diocèse ne veut pas entrer dans un jeu mercantile et devrait se retrouver en insolvabilité
C’est une tradition centenaire au Vatican: les Urtisti (littéralement «ceux qui heurtent») abordent les fidèles pour leur proposer des objets de piété. Ces commerçants ambulants, qui revendiquent une pratique remontant à 1555, restent ancrés autour de Saint-Pierre.
Une vingtaine de stands proposeront cependant des souvenirs et objets liturgiques jeudi, en marge de la grande messe organisée à Palexpo par le diocèse de Lausanne, Genève et Fribourg. «Ce n’est pas un salon de l’auto catholique, précise d’emblée Jean-Baptiste Henry de Diesbach, l’administrateur et économe du diocèse. Le bénéfice sera tout à fait marginal dans le budget total. Nous ne voulions pas de marchands du temple.»
Les boutiques seront d’ailleurs dans la halle 7, séparées de la grande messe donnée par le pape à 17h30 dans les halles 4 à 6. Plusieurs stands tenus par l’Eglise catholique genevoise vendront des souvenirs au profit de l’organisation de la messe: bougies, chapelets, porte-clés. Certains stands seront non commerciaux, comme ceux de la revue jésuite Choisir et de l’organisation d’entraide Action de Carême. Et la nouvelle bière de l’évêque, la Caramélite, sera proposée du côté des nourritures et boissons.
Quant à la présence de vendeurs à la sauvette, elle paraît peu probable selon Pierre-Yves Fux, fin connaisseur du Vatican et ambassadeur de la Suisse près le Saint-Siège: «La visite a été annoncée avec un préavis très bref. Compte tenu de la barrière de la langue, cela me paraît douteux.»
Un million manquant
Organisateur de la messe, le diocèse ne veut pas entrer dans un jeu mercantile. Il se retrouve cependant en difficulté. «Nous avons fait une projection: si les dons se poursuivent à ce rythme, il nous manquera 1 million sur les 2,3 millions que coûte l’événement. Or nous n’avons pas les reins assez solides pour assumer cette perte», relève Jean-Baptiste Henry de Diesbach, confirmant une information de la RTS. Ramenée aux 40000 personnes inscrites gratuitement à la messe, la somme correspond à environ 50 francs par tête, «moins que pour un concert», rappelle-t-il.
La sécurité représentera la plus grosse dépense, plus de 1 million de francs, tandis que 700000 francs sont budgétisés pour l’infrastructure (location de Palexpo, installation de chaises, aménagement de la scène) et près de 400000 pour l’audiovisuel. Cinq écrans géants seront notamment installés à l’intérieur des halles. En revanche, l’idée de retransmettre la messe à l’extérieur a été abandonnée dès le départ: «Sans billet, il n’y a rien à voir aux abords de Palexpo», précise Jean-Baptiste Henry de Diesbach.
Les corporations et fédérations ecclésiastiques – des organes cantonaux gérant notamment les finances de l’Eglise et ses liens avec l’Etat – prévoient d’apporter une forte somme: 300000 francs, accompagnés d’une couverture de déficit de
250000 francs. Les paroisses ont également été invitées à contribuer. Quant aux fonds propres du diocèse, ils s’élèvent à 370000 francs. «Je n’aime pas utiliser le terme «faillite», mais on va se retrouver en insolvabilité technique», prévient l’économe de l’évêché.
Dons par SMS
La messe du pape François est gratuite et aucune quête ne sera faite, selon des instructions du Vatican. Les fidèles pourront cependant faire un don sur place et un système par SMS a été mis en place. Envoyer «pape 30» au 488 permet par exemple de verser 30 francs.
«Lors d’une visite du pape, il est habituel que les frais de liturgie soient pris en charge par l’Eglise locale. Pour le reste, c’est un modèle classique de financement de voyage officiel, relève Pierre-Yves Fux. Le chef d’Etat qui part à l’étranger prend en charge son voyage et, s’il le souhaite, est accompagné de ses propres gardes du corps, tandis que l’Etat hôte est responsable des mesures de sécurité, y compris en matière de trafic aérien et automobile.»
Le coût total de la visite du pape sera supérieur au budget de 2,3 millions, qui correspond à la seule messe à Palexpo. En effet, après une rencontre avec le Conseil fédéral, le Conseil oecuménique des Eglises (COE) reçoit le souverain pontife de 11h à 17h environ dans le cadre des célébrations des 70 ans de sa fondation. Et les coûts de mobilisation de la police et de l’armée restent une grande inconnue.
Jusqu’à 200 soldats seront mobilisés, indique le Département fédéral des affaires étrangères. De son côté, le Département genevois de la sécurité ne détaille pas les effectifs. «Le coût final du dispositif policier dépendra du déroulement de la visite; il est difficile à évaluer avec précision à l’avance, précise sa porte-parole, Emmanuelle Lo Verso. La facture sera transmise aux organisateurs après l’événement.» Une loi genevoise entrée en vigueur l’an dernier prévoit en effet que les organisateurs versent «un émolument correspondant aux coûts de l’engagement de moyens policiers spécifiques et extraordinaires», à moins d’obtenir une exonération. Dans le cas de la venue du pape, la discussion relative à la facture «est toujours en cours», précise Emmanuelle Lo Verso.
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«Le chef d’Etat qui part à l’étranger prend en charge son voyage et, s’il le souhaite, est accompagné de ses propres gardes du corps, tandis que l’Etat hôte est responsable des mesures de sécurité» PIERRE-YVES FUX, AMBASSADEUR DE LA SUISSE PRÈS LE SAINT-SIÈGE