«La Confédération doit intervenir à Moutier»
C’est un Bernois de Moutier, Pascal Eschmann, qui préside dorénavant le PDC jurassien. Un symbole fort au moment où le processus de transfert de la ville est au point mort
Secoué par des mois de crise déclenchée par l’affaire Queloz, le PDC jurassien s’est choisi un nouveau président, Pascal Eschmann, 57 ans, architecte de formation et membre de l’exécutif de la ville de Moutier. L’homme aura la double tâche de réconcilier la «grande famille» démocrate-chrétienne jurassienne et de faire aboutir le transfert de la cité bernoise dans le canton du Jura, aujourd’hui bloqué par une cascade de recours.
Un Bernois président d’un parti jurassien, c’est assez particulier… C’est surtout un geste symboliquement fort, même si concrètement la section de Moutier a été intégrée au PDC jurassien au début du mois de février. En m’élisant, le parti démontre toute sa volonté d’accueillir Moutier, de l’accueillir de façon très concrète.
Justement, une année exactement après le vote historique du 18 juin 2017, le processus de Moutier est au point mort. Quel regard portez-vous sur cette crise? On a dit tout et n’importe quoi sur le vote de Moutier et cela me désole. Je constate, car je suis quelqu’un de très factuel, que le vote a été contrôlé par des experts fédéraux. Les accusations d’actes illicites et de tourisme électoral lancées par les opposants ont été rejetées, tant par le Ministère public bernois pour les premières que par un rapport d’experts de l’Université de Fribourg pour les secondes. Alors que beaucoup de ceux qui ont voté non au transfert de Moutier veulent tourner la page et aller de l’avant, une minorité va tout tenter pour retarder le processus, quitte à salir la ville et ses autorités. Ces groupes mènent une politique de la terre brûlée.
Comment sortir de cette impasse? Il faut que la Confédération intervienne à Moutier. La Suisse n’estelle pas connue pour sa pratique des bons offices qu’elle propose dans le monde entier? Alors pourquoi pas ici? La Berne fédérale ne peut plus continuer à rester en retrait, sous prétexte que des procédures juridiques sont en cours. Il y a bien sûr le principe de séparation des pouvoirs. Mais on ne peut pas laisser la situation s’enliser pareillement au risque de dommages collatéraux et de dégâts d’image catastrophiques.
Autre dossier brûlant de votre présidence, vous reprenez les rênes d’un parti en pleine crise, avec des menaces de scission. Comment rassembler à nouveau le parti? J’ai l’avantage d’arriver de l’extérieur du canton. Je peux ainsi me présenter comme un président rassembleur ne faisant partie d’aucun clan. Car les tensions sont dues avant tout à des individus; il ne s’agit pas de divergences politiques. Il faut remettre de l’ordre dans cette maison PDC qui s’est perdue dans des conflits personnels. Nous devons retourner à la base rencontrer les militants, les sections. Il y a un sacré travail de fond à reprendre.
«La Suisse n’estelle pas connue pour sa pratique des bons offices, qu’elle propose dans le monde entier? Alors pourquoi pas ici?»
Parti fondateur du canton, le PDC jurassien ne souffre-t-il pas aussi d’une certaine usure du pouvoir? Pendant quarante ans, la création du canton a été un projet fédérateur. Et le PDC a oeuvré à sa construction et à sa gestion, demeurant toujours proche de l’Etat jurassien. Mais aujourd’hui, nous devons nous affranchir de ce combat et proposer des solutions qui touchent la vie quotidienne de la population, du soutien aux PME à une responsabilité sociale. Les valeurs démocrates-chrétiennes sont profondément ancrées dans le Jura. Si nous arrivons à démontrer aux citoyens que nous oeuvrons pour leurs intérêts, je suis persuadé qu’ils nous suivront.