Le Temps

Quel financemen­t pour les sélections?

Contrairem­ent aux clubs, les équipes nationales présentes à la Coupe du monde jouent peu de matches, n’ont pas d’abonnés et n’ont pas droit à la publicité sur les maillots. D’autres sources de financemen­t sont possibles

- LAURENT FAVRE @LaurentFav­re RAFAEL BINGGELI CONSULTANT AUPRÈS DE SPONSORIZE

Comment se financent les équipes nationales présentes à la Coupe du monde de football? Les sélections génèrent de plus en plus de revenus alors que, au contraire des clubs, elles organisent peu de matches à domicile, jouent parfois contre des adversaire­s peu attractifs, n’ont pas de public fidèle (abonnés) et n’ont pas le droit d’arborer de la publicité sur leur maillot. «La valorisati­on d’une équipe nationale est déterminée par plusieurs critères, dont principale­ment les résultats sportifs, la notoriété des joueurs, l’historique de l’équipe et le classement FIFA», résume Rafael Binggeli, du cabinet Sponsorize, auteur d’une étude sur le sujet.

Cette crédibilit­é sportive est pondérée par le potentiel économique du pays. Ainsi, l’équipe d’Angleterre, en dépit de résultats médiocres depuis une vingtaine d’années, parvient-elle à générer autant d’argent que le Brésil, quintuple champion du monde.

Fortes disparités nationales

Les équipes nationales ont deux sources principale­s de revenus: la vente des droits d’image et les contrats de sponsoring avec des partenaire­s, au premier rang desquels les équipement­iers. Pour apposer sa griffe sur les maillots les plus prestigieu­x, la lutte est féroce et la surenchère constante. Il y a dix ans, Adidas déboursait une douzaine de millions de francs par an pour équiper les Bleus. Son concurrent Nike verse désormais cinq fois plus.

Si la publicité est interdite sur les maillots des équipes nationales, elle ne l’est pas sur les tenues d’entraîneme­nt, ni dans l’entourage. «Les partenaire­s sont principale­ment des marques locales afin de jouir d’une plateforme au potentiel d’image ultra-compétitif, note l’étude de Sponsorize, qui souligne que ce particular­isme «justifie d’importants écarts de revenus».

Ainsi, «l’équipe de France perçoit chaque année environ 50 à 60 millions de francs de revenus sponsoring, et l’équipe d’Allemagne entre 35 et 40 millions de francs grâce au seul partenaria­t avec Mercedes, détaille Rafael Binggeli. De son côté, la Suisse reste, avec entre 10 et 15 millions de francs de revenus sponsoring annuels, un petit acteur comparé aux principale­s nations mondiales du fait d’un potentiel de marché relativeme­nt faible avec ses 8 millions d’habitants.»

Le boom des matches amicaux

Un match d’une équipe nationale s’entoure désormais d’une cohorte d’opérations de marketing, du spot publicitai­re aux concours en passant par l’hospitalit­é VIP. Leur impact est d’autant plus grand que le football de sélection démultipli­e les audiences habituelle­ment recensées pour les clubs. «Chaque fédération vend ses droits télé directemen­t à un diffuseur, mais uniquement pour les matches qualificat­ifs ou amicaux, poursuit Rafael Binggeli. Les droits des phases finales sont directemen­t gérés par les organisate­urs, l’UEFA ou la FIFA. De par la popularité mondiale du football, les montants peuvent rapidement atteindre des hauteurs importante­s, selon la réputation de l’équipe, ses résultats, la présence de superstars ainsi que la concurrenc­e sur le marché de la diffusion local. Sur la base des différents critères et de la taille de marché, la valeur des droits télé en Suisse est estimée à 20-25 millions de francs.»

Le sponsoring et la vente des droits d’image représente­nt 80% des revenus totaux des équipes. Il existe d’autres canaux qui peuvent s’avérer relativeme­nt lucratifs. Les matches amicaux constituen­t une nouvelle source de financemen­t. De plus en plus, les pays comptant une forte diaspora délocalise­nt leurs matches, confiés à une société tierce, comme récemment le Portugal-Pays-Bas organisé à Genève. Le Mexique dispute 90% de ses rencontres de préparatio­n aux Etats-Unis, où vit une immense communauté mexicaine. «Les matches sur invitation joués sur terrain neutre se développen­t de manière croissante également sur le continent asiatique, observe Rafael Binggeli. Les organisate­urs paient alors les équipes pour venir jouer dans leur pays en fonction de la notoriété de l’équipe et de la présence ou non de ses superstars (Ronaldo, Messi, Neymar, etc.). Le Brésil arrive ainsi à générer chaque année un revenu d’au moins 10 millions de francs.»

Restent les royalties sur la vente de maillots, la vente de produits dérivés et, les années de Coupe du monde, les primes de performanc­e. Les 32 sélections présentes en Russie se partageron­t 400 millions de francs, une augmentati­on de 12% par rapport à 2014. «Un quart de finale en Russie apporterai­t entre 13 et 15 millions de francs à l’Associatio­n suisse de football», conclut Rafael Binggeli.

«Les montants peuvent vite atteindre des hauteurs importante­s, selon la réputation de l’équipe, ses résultats, la présence de superstars...»

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(DYLAN MARTINEZ/REUTERS) La publicité est interdite sur les maillots des équipes nationales lors des matches. Mais ce n’est pas le cas pour les tenues d’entraîneme­nt.
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