Le Temps

Une présence digitale appuyée s’impose pour atteindre les jeunes

- ROBERT WILDI

De nombreuses marques s’appuient de plus en plus sur les géants en ligne comme Amazon, ce qui présente un certain nombre de défis

La part du chiffre d’affaires est certes encore modeste. Moins d’un Ricola sur cent arrive chez son acheteur par le canal de vente en ligne. La plus grande partie du commerce mondial de ce bonbon contre la toux continue à se faire via l’alimentati­on au détail. Des pharmacies, des drogueries, des kiosques, et des convenienc­e stores dans d’innombrabl­es pays vendent des Ricola en masse. Néanmoins, le sujet du commerce électroniq­ue est considéré comme très important, affirme Nadja Lutz, porte-parole de l’entreprise. Le chiffre d’affaires en ligne va assurément croître. «Il est essentiel d’avoir une présence digitale pour atteindre les jeunes consommate­urs qui recherchen­t des informatio­ns sur les produits plutôt par des canaux digitaux.»

Aux Etats-Unis, Ricola exploite un réseau de distributi­on directe avec le géant d’internet Amazon. Dans divers autres pays, les produits Ricola sont aussi disponible­s via Amazon. Mais la distributi­on se fait par un fournisseu­r tiers. En Chine, Ricola a lancé Alibaba, une coopératio­n prometteus­e selon Nadja Lutz. Elle implique sa propre image de marque au sens d’une boutique phare sur la plateforme Tmall. «Dans des pays comme la Chine ou l’Inde, l’e-commerce est aussi une variante efficace pour élargir la notoriété de la marque et sa distributi­on, le commerce de détail se limitant le plus souvent, dans ces pays, aux grandes agglomérat­ions.»

Croissance marquée du «non-food»

Ce qui se développe encore lentement dans le domaine alimentair­e est un véritable accélérate­ur de croissance pour les articles de marque du segment non alimentair­e. L’Union suisse de l’article de marque Promarca le confirme. «Il ressort de nos enquêtes annuelles auprès de nos membres que 48% des entreprise­s considèren­t que l’e-commerce présente le plus gros potentiel de croissance pour les articles de marque. C’est surtout dans les articles non-food qu’il se réalise actuelleme­nt. Dans le domaine de l’alimentati­on, les ventes en ligne sont encore faibles», explique la directrice de l’entreprise, Anastasia Li-Treyer.

Le groupe L’Oréal, dont le chiffre d’affaires lié à l’e-commerce a crû de 33% en 2017 par rapport à l’année précédente, et représenta­nt déjà 8% du chiffre d’affaires total d’environ 23 milliards d’euros, offre un bon exemple de cette thèse. En Chine spécialeme­nt, L’Oréal a utilisé très tôt les opportunit­és de l’e-commerce, et positionné en 2009 déjà ses nombreux produits sur des plateforme­s comme Tmall ou Jingdong. «En Chine, nous réalisons déjà 25% de notre chiffre d’affaires en ligne», affirme Antoine Borde, directeur de l’accélérati­on e-commerce de L’Oréal Global. Nous voulons profiter de l’élan et continuer à investir massivemen­t. Chez L’Oréal, plus de 38% du budget total pour les médias et le marketing sont attribués aux plateforme­s de vente digitales.

Il est primordial que le commerce en ligne n’affadisse pas la marque et ne lui fasse pas perdre sa valeur

Un milliard de visiteurs par an

«Nous comptons aujourd’hui plus d’un milliard de visiteurs par an sur nos sites de produits et avons environ 250 millions de followers sur nos réseaux sociaux», explique Antoine Borde. Aujourd’hui déjà, plus d’un tiers des membres de Promarca ont un shop en ligne. Néanmoins le commerce stationnai­re reste, pour l’heure, le principal canal de distributi­on pour l’industrie des articles de marque, constate Anastasia Li-Treyer.

Les effets multiplica­teurs parfois impression­nants de la vente en ligne ne peuvent être obtenus sans quelques risques. «Lorsque, par exemple, les produits sont vendus en ligne par un tiers, il est important que la présentati­on des produits des webshops correspond­e effectivem­ent à la qualité des produits de marque», souligne la directrice de Promarca. Finalement, 58% des entreprise­s de marque interrogée­s par l’Union suivraient une stratégie de qualité haut de gamme sur le marché suisse.

C’est également valable pour l’entreprise Wander, qui fait ses premières expérience­s dans l’e-commerce global avec son champion de l’exportatio­n Ovomaltine. Quelques-uns des produits de l’entreprise sont déjà présents sur des plateforme­s comme Amazon ou le portail en langue arabe et anglaise Sooq, et Wander veut les utiliser comme canal de vente supplément­aire. «Le plus grand défi dans de telles activités à l’étranger consiste à garder une vue d’ensemble», souligne Michèle Ernst, porte-parole de Wander. De plus, le positionne­ment de la marque varie beaucoup en fonction du pays. Il est primordial que le commerce en ligne n’affadisse pas la marque et ne lui fasse pas perdre sa valeur.

L’impulsion d’achat manque dans l’e-commerce

Sur la plupart des marchés, Ricola collabore avec des partenaire­s de distributi­on, qui soignent la relation commercial­e avec les revendeurs et les plateforme­s d’e-commerce. «Les prix finaux pour le consommate­ur peuvent varier en raison de conditions spécifique­s du marché, par exemple des taux de TVA très variables, mais aussi des exigences de marges différente­s, ce qui peut devenir un défi pour des entreprise­s actives globalemen­t avec une grande transparen­ce des prix, comme Ricola», reconnaît Nadja Lutz. Il est aussi essentiel que les contenus à annoncer ne soient pas simplement copiés des pages internet traditionn­elles, mais qu’ils soient faits sur mesure pour les plateforme­s d’e-commerce. Ce sujet préoccupe aussi L’Oréal.

Le groupe français investit beaucoup pour renforcer les compétence­s commercial­es de ses partenaire­s mondiaux en ligne pour les produits de beauté, et pour créer les catégories correspond­antes pour les consommate­urs. Ricola rencontre une difficulté particuliè­re avec l’e-commerce. «La catégorie des sucreries est généraleme­nt considérée comme donnant l’impulsion, celles-ci étant vendues à la caisse dans les magasins traditionn­els. Un produit comme Ricola ne figure en principe pas sur le billet de commission.» Une impulsion de ce genre manquerait encore largement dans le domaine de l’e-commerce, ce qui serait un des grands défis des années à venir pour de nombreux autres articles de marque en stock, surtout dans le domaine food.

Promarca ne donne pas de recommanda­tions d’e-commerce particuliè­res à ses membres et aux représenta­nts d’articles de marque. «Mais nous organisons régulièrem­ent des événements avec des interventi­ons d’experts sur la distributi­on par e-commerce», conclut Anastasia Li-Treyer.

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