Travail des réfugiés: le modèle grison
Dans les Grisons, 17,5% des demandeurs d’asile en attente d’un statut définitif ont une activité professionnelle. A Genève et dans le canton de Vaud, ils ne sont que 7% à travailler. Ces chiffres contrastés montrent à quel point les cantons sont libres d’agir pour traiter le problème brûlant que représente la prise en charge des migrants et son coût pour la société.
Parfois par peur d’un appel d’air migratoire, ou de concurrencer les travailleurs indigènes, les cantons ont longtemps pratiqué un certain protectionnisme régional. En prolongeant, par exemple, l’interdiction de travailler faite aux demandeurs d’asile durant trois mois après leur arrivée. Ou en restreignant les permis de travail à certains secteurs. Pourtant, freiner l’accès à l’emploi ne ralentit pas l’immigration, mais la rend plus précaire.
En Suisse alémanique, les familles nombreuses de réfugiés vivant de l’aide sociale sont la cible des campagnes de la droite anti-immigration. Pourtant, lorsque leur santé le permet, les nouveaux venus préfèrent un emploi, même peu qualifié, à l’assistance. Les restrictions cantonales risquent d’aggraver la précarité d’une population dont le parcours est déjà entravé par de mauvaises connaissances de la langue et de faibles qualifications.
Souvent, les autorités estiment qu’il vaut mieux privilégier l’intégration des réfugiés reconnus, et négligent ceux qui se trouvent dans la toute première phase de la procédure d’asile. C’est une erreur. Aux Grisons, où les requérants accèdent plus facilement à un emploi, 60% des individus qui ont obtenu le statut de réfugié (permis B) travaillent après quatre ans de séjour, contre 15% à Genève.
Le Conseil fédéral prévoit de donner aux cantons davantage de moyens pour l’intégration des réfugiés. Mais ceux-ci feraient bien de commencer par revoir les conditions d’accès des demandeurs d’asile à l’emploi. Sur ce plan, les recettes grisonnes ne sont pas miraculeuses, mais finalement assez évidentes. Elles ne consistent pas seulement à investir dans des programmes de coaching et des cours de langue. Mais aussi à ouvrir le marché du travail, en évitant de marginaliser des demandeurs d’asile, futurs réfugiés, qui ont de toute façon vocation à demeurer un certain temps en Suisse.
Freiner l’accès à l’emploi ne ralentit pas l’immigration, mais la rend plus précaire