Le Temps

A Wimbledon, la «master class» de Roger Federer

- LAURENT FAVRE, WIMBLEDON @LaurentFav­re

TENNIS Le Bâlois s’est qualifié pour le troisième tour en donnant une leçon au Slovaque Lukas Lacko (6-4 6-4 6-1). Et peut-être aussi à l’équipe de Suisse de football

Roger Federer est un passionné de sport, un ancien footballeu­r, un supporter de l’équipe de Suisse, un patriote, un proche de certains joueurs de la Nati. Mais c’est aussi, et surtout, un parfait connaisseu­r des exigences du haut niveau et un champion capable d’analyse sans concession. Mardi, devant sa télévision, dans la villa qu’il loue pour sa famille pendant le tournoi de Wimbledon, le Bâlois a comme des milliers d’autres Suisses été déçu par la performanc­e de l’équipe nationale de football, éliminée de la Coupe du monde par la Suède (1-0).

Il l’a dit mercredi en conférence de presse, après sa victoire au deuxième tour sur Lukas Lacko (6-4 6-4 6-1). Sans acrimonie mais avec beaucoup de clarté. «J’attendais plus de l’équipe, reconnut-il. C’est une opportunit­é manquée. Dans ces matchs à éliminatio­n directe, les onze joueurs doivent évoluer au meilleur niveau, pas juste trois et les huit autres à côté. Je pensais que nous aurions notre chance, mais finalement la Suède était peut-être juste meilleure. Il n’y a pas d’amertume à avoir, nous avons eu ce que nous méritions. Peut-être ne sommesnous pas parmi les huit meilleures équipes du monde.»

Roger Federer est, lui, l’un des deux meilleurs joueurs du monde, et le meilleur de l’histoire du tennis. Et lorsqu’il parle des manques de l’équipe de Suisse, il parle aussi de sa vision du sport, de ce qui l’a porté aussi haut. «Ce que j’ai appris de ma carrière, confia-t-il, c’est qu’on ne peut pas se permettre de penser que cela va venir tout seul, ou que vous serez bon parce que vous l’avez été le match précédent. C’est un effort constant, de chaque match, de chaque entraîneme­nt. Vous ne valez que ce que vaudra votre prochaine performanc­e, vraiment.»

Mercredi en début d’après-midi, le hasard nous fit croiser Roger Federer dans le restaurant des joueurs, deux heures environ avant son match contre le Slovaque Lukas Lacko. Assis à une table avec son coach Ivan Ljubicic, relativeme­nt anonyme dans son survêtemen­t gris, il était parfaiteme­nt détendu et avouait n’avoir aucun souvenir de ses deux précédente­s confrontat­ions avec son adversaire du jour (deux premiers tours à Melbourne en 2011 et Roland-Garros en 2014). Il était à cet instant parfaiteme­nt détendu et ne présentait aucun signe extérieur de nervosité. Cela ne l’empêcha pas de prendre ce match et cet adversaire avec le plus grand respect. «Ce que vous devez bien comprendre, expliqua-t-il par la suite, c’est qu’au moment où je pénètre sur le court, je ne sais pas si ce sera pour une partie facile ou une bataille en cinq sets. Ce que je sais, c’est que je suis favori mais que lui aime bien le gazon, qu’il vient de faire une finale au tournoi d’Eastbourne, qu’il est en confiance. Alors j’emporte avec moi tout ce qu’il faut en raquettes et tenues pour tenir très longtemps. Et je commence le match avec beaucoup d’énergie parce que je sais qu’il est important que je remporte le premier set.»

Le secret d’un grand service

Ce qu’il fait: 6-4 en 38 minutes. Les six premiers jeux sont équilibrés, puis Federer accélère et se détache. Il breake une première fois à 4-3. Dans la deuxième manche, il gagne 100% des points sur ses premières balles. Il enchaîne même 35 points consécutiv­ement sur ses mises en jeu, de 5-4 dans le premier set à 6-4 6-4 4-1 (30-0) dans le troisième. A un moment du match, une statistiqu­e apparue sur un écran de la BBC établit qu’il met en moyenne 70 secondes pour remporter ses jeux de service. Sur l’ensemble du match, conclu en 1h30, Lukas Lacko n’a obtenu aucune balle de break.

C’est le gazon, cela va vite et Roger Federer est un grand serveur. Mais là encore, il y a derrière tout cela bien plus qu’une capacité du moment. «Ce qui me semble important lorsque l’on veut bien servir, souligna Federer après sa victoire, c’est d’avoir une mentalité de «point par point», se dire que peut-être le premier point du jeu est aussi important qu’une balle de break et que la concentrat­ion doit être la même.»

Federer n’est pas encore en huitième de finale, seulement au troisième tour. Il affrontera vendredi l’Allemand Jan-Lennard Struff (28 ans, 64e joueur mondial), qu’il a lui aussi battu lors de leurs deux précédente­s confrontat­ions. Mené deux manches à rien par le géant croate Ivo Karlovic, Struff est sorti vainqueur d’un duel de gros serveurs, conclu 13-11 dans le cinquième set. Mais Roger Federer sait mieux que quiconque ce qui distingue le champion du bon joueur: la capacité à être performant plusieurs fois de suite.

«Au moment où je pénètre sur le court, je ne sais pas si ce sera pour une partie facile ou une bataille en cinq sets. Et je commence le match avec beaucoup d’énergie» ROGER FEDERER

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