Le Temps

Deux tours complets du Vésuve

- Par Julie Rambal

La soirée s’annonçait idyllique. Tout le monde avait travaillé dur pour honorer cette terrasse au-dessus de la mer en préparant un dîner parfait. A peine étionsnous attablés qu’une amie avait plombé la gaîté en reprochant à son amoureux de l’avoir ignorée à la plage, plus tôt. Il avait riposté. Leur rage obscène avait poussé les convives à abandonner leur bar grillé pour aller se réfugier dans le salon.

Comme leurs préférence­s sexuelles, les couples ne devraient jamais exposer leurs chamailler­ies. Mais l’été est propice aux exhibition­s, et je suis rarement partie avec des amis sans profiter de leurs frictions. Il paraît que chaque mois de septembre enregistre un pic de divorces, sans doute à la hauteur des espoirs déçus. L’amie qui avait si bien bousillé notre dîner corse m’a confié avec honnêteté que se disputer en vacances est une manière de tromper l’ennui de journées trop longues et vides.

J’ai souvent assisté aux disputes estivales des autres en célibatair­e. Ricanant intérieure­ment. Moi amoureuse, jamais je ne gâcherais une parenthèse estivale. Et puis, fraîchemen­t mariée, je suis partie avec mon compagnon sur la côte Amalfitain­e en voiture. Epuisée par 800 km de route, j’ai mal lu la carte, nous imposant deux tours du Vésuve par l’autoroute, avant de dénicher Sorrente. Au moins, nos cris dans l’habitacle n’ont ruiné les vacances de personne. Juste les nôtres, à bouder le reste du séjour dans un hôtel délicieux, et se demander s’il ne valait pas mieux divorcer puisque nous étions capables de nous haïr avec une telle fulgurance.

L’été suivant, nous avons acheté un GPS. Depuis, les voyages sont paisibles. Sauf quand celui qui conduit commence à s’ennuyer parce que son copilote, dégagé de toute responsabi­lité, scrolle sur son smartphone depuis des heures. En voiture aussi, on occupe comme on peut ses journées estivales longues et vides.

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