Des travaux longs comme un jour sans train
TRANSPORTS PUBLICS Les CFF suspendent une partie du réseau entre Lausanne et Berne pendant sept semaines pour le rénover. Jamais tentée sur une ligne de cette importance, l’interruption complète du trafic doit encore faire ses preuves
La Conversion, mercredi matin. Des centaines d’hommes en orange s’activent dans la poussière de ce qui était une voie de chemin de fer jusqu’au 7 juillet dernier. Moins d’une semaine plus tard, les rails côté lac ont disparu, l’ancien abri de gare n’est plus qu’un souvenir et le bruit des pelles mécaniques a remplacé celui des locomotives. Déjà imposant, le chantier ne fait que commencer. Durant sept semaines, jusqu’au 26 août, plus aucun train ne circulera entre Lausanne et Puidoux sur l’axe Lausanne-Berne, l’une des lignes les plus fréquentées de Suisse.
Course contre la montre
Les travaux planifiés sont multiples. A l’aide de grosses locomotives diesel – le réseau électrique ayant été coupé –, 600 ouvriers sont appelés à travailler jusqu’à 16 heures par jours, parfois également de nuit, pour remplacer 35000 tonnes de ballast, 8 aiguillages et 20 kilomètres de rail en 50 jours. En piteux état, les vieilles traverses en bois des années 80 céderont leur place au nouveau modèle en béton (286 kilos pièce). Trois gares, Pully-Nord, La Conversion et Grandvaux, seront également refaites, notamment pour mettre aux normes les accès pour handicapés. Enfin, les tunnels de Puidoux-Chexbres et Grandvaux seront assainis et l’évacuation des eaux sera améliorée sur toute la ligne. Budget total des opérations: 41 millions de francs, financés entièrement par la Confédération.
A-t-on trop attendu pour qu’autant d’opérations soient nécessaires au même moment? «Non, répond Nicolas Pasquier, chef de projet. Ces équipements arrivaient simplement en fin de vie. L’interruption du trafic a juste avancé certaines échéances.» Pour rénover, dit-il, trois options étaient sur la table: «Travailler uniquement de nuit, ce qui aurait pris plus d’une année et fortement ralenti les trains en journée. Rénover une voie après l’autre, ce qui aurait duré deux fois quatre mois avec beaucoup de retard pour les usagers et de longs désagréments pour les voisins. Et fermer totalement le trafic, comme nous avons décidé de le faire.» Cette dernière option a pour avantage de raccourcir la durée du chantier et de permettre aux ouvriers de travailler sans courir le risque d’une collision avec un train ou d’une électrocution.
La météo comme épée de Damoclès
Une telle interruption suscite tout de même des désagréments, non seulement pour les usagers du rail mais également pour les riverains. «Des séances d’information ont été organisées pour les voisins avant les travaux, dit Nicolas Pasquier. Quant aux pendulaires, celui dont le temps de parcours aura été rallongé de 20 minutes et plus sur un minimum de 10 jours durant la durée des travaux est éligible à un dédommagement de 100 francs.» Pour cela, l’activation des données de géolocalisation sur l’application mobile des CFF, et donc un smartphone, sont toutefois nécessaires.Un service de bus a par ailleurs été mis en place entre Lausanne et Puidoux et des navettes ferroviaires supplémentaires circulent entre Lausanne et Fribourg, via Vevey. Dans la mesure du possible, les CFF suggèrent par ailleurs le télétravail. «Pour le moment, tout fonctionne comme prévu, se félicite Frédéric Revaz, porte-parole de l’entreprise. Les gens semblent bien s’accommoder des mesures en place.» Son unique peur: que le ciel lui tombe sur la tête. «De grosses pluies pourraient retarder le planning», concède-t-il. Et si le ciel devait se couvrir, et le chantier se prolonger, il y a fort à parier que la bonne humeur actuelle des voyageurs s’assombrirait elle aussi.