Le Temps

Bell veut séduire les végétarien­s avec sa viande de synthèse

- MATHILDE FARINE, ZURICH @MathildeFa­rine

Le groupe a investi 2 millions d’euros dans la start-up néerlandai­se Mosa Meat, qui fabrique des burgers en laboratoir­e. Ce serait une solution à la hausse constante de la consommati­on de viande

Face à la consommati­on qui ne cesse d’augmenter, la production actuelle de viande ne suffira plus. C’est le constat de l’entreprise suisse spécialisé­e dans les produits carnés Bell Food Group, qui cherche des moyens de le pallier. Elle en a trouvé un ce mardi: un investisse­ment de 2 millions d’euros (2,33 millions de francs) dans le capital de la start-up néerlandai­se Mosa Meat, qui fabrique de la viande bovine cultivée.

Aussi appelée viande synthétiqu­e, in vitro ou de laboratoir­e, elle est produite en cultivant des cellules animales plutôt qu’en élevant des animaux, explique un prospectus de Bell, qui assure qu’il s’agit d’une «véritable viande qu’il est impossible de différenci­er au microscope de la chair de vache, de cochon ou de poule». C’est la première fois que Bell s’aventure dans la viande cultivée et ce pas apparaît plutôt stratégiqu­e et modeste, au regard de son chiffre d’affaires de 4 milliards de francs.

Alternativ­e «éthique»

Cette nouvelle source de viande devrait aider à faire face à une demande qui va augmenter de 70% dans le monde d’ici à 2050, explique Bell dans un communiqué, se basant sur des projection­s de l’Organisati­on des Nations unies pour l’alimentati­on et l’agricultur­e (FAO). L’entreprise compte faire d’une pierre deux coups: répondre à cette demande, mais aussi offrir «une alternativ­e aux personnes préoccupée­s par leur consommati­on de viande pour des raisons éthiques». Car le groupe bâlois en est certain, «il existe un marché. Sa taille est difficile à prédire, mais il existe», affirme un porte-parole. L’entreprise n’a pas mené elle-même d’étude de marché, elle dit se baser sur des études réalisées ailleurs dans le monde.

«Nous en sommes encore à un stade très précoce, même si des prototypes ont déjà été testés» BELL FOOD GROUP

Pour l’instant, Bell admet ne pas savoir précisémen­t quand cette viande pourra être commercial­isée. En tous les cas, probableme­nt pas avant 2021. «Nous en sommes encore à un stade très précoce, même si des prototypes ont déjà été testés», selon le porte-parole de l’entreprise. Se posera aussi la question du prix, pour l’instant astronomiq­ue. «Le but est de trouver un moyen de produire cette viande à un prix concurrent­iel», poursuit-il.

Au total, Mosa Meat a levé 7,5 millions pour financer ses travaux de recherche jusqu’en 2021. Elle avait présenté son premier burger de 150 grammes fabriqué avec des cellules de vaches en 2013. C’est le cofondateu­r de Google, Sergey Brin, qui avait financé son coût de production, 333000 dollars.

Spécialist­e des produits carnés, Bell débute dans la viande cultivée, mais il propose déjà des produits végétarien­s et végétalien­s. Un segment qui représente désormais un quart de son chiffre d’affaires. Au premier semestre, son résultat avant intérêts et impôts (EBIT) devrait cependant se réduire de 10 millions par rapport à la même période l’an dernier, a prévenu Bell, dans le même communiqué. Une annonce qui a fait chuter le cours de plus de 10% à la bourse suisse.

«Viande propre»

Mosa Meat se présente comme le leader de la viande cultivée, mais d’autres start-up se sont attaquées à ce créneau ces dernières années, notamment dans la Silicon Valley. Memphis Meats, par exemple, qui a reçu des financemen­ts de Bill Gates et Richard Branson, a fait goûter ses premières boulettes de viande «propre» deux mois après le burger néerlandai­s. A l’occasion de cet investisse­ment, en 2017, le fondateur de Virgin avait expliqué à Bloomberg: «Je crois que dans une trentaine d’années, nous n’aurons plus besoin de tuer des animaux et que toute la viande sera soit propre, soit fabriquée à base de plantes, aura le même goût et sera meilleure pour la santé de tout le monde.»

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(DAVID PARRY/PA WIRE) Un burger de viande synthétiqu­e développé par le professeur Mark Post, de l’Université de Maastricht, aux Pays-Bas.

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