La crédibilité écornée de Johann Schneider-Ammann
La NZZ a parlé d’une «mission impossible». Johann Schneider-Ammann, ministre de l’Economie, dispose de quinze jours pour tenter d’obtenir une marge de manoeuvre auprès des partenaires sociaux avant d’aller négocier à Bruxelles sur la délicate question des mesures d’accompagnement.
Sur le papier, les termes de l’équation sont simples. La Suisse aimerait conclure un accord institutionnel avec l’Union européenne pour rénover la voie bilatérale, de manière à rétablir une stabilité juridique avec son principal partenaire économique. Elle tient absolument à obtenir dans la foulée l’équivalence boursière sans limite dans le temps.
Mais, voilà deux mois, Bruxelles a mis la Suisse sous pression: il n’y aura pas d’accord si Berne ne fait pas de concessions sur les mesures d’accompagnement, qui, selon l’UE, violent le texte sur la libre circulation des personnes.
Lorsque les deux ministres PLR du gouvernement ont donné des signes d’ouverture sur ce plan, le président de l’Union syndicale suisse, Paul Rechsteiner, s’est fâché tout rouge. Il est prêt à lancer un référendum contre un accord avec Bruxelles affaiblissant la protection des travailleurs suisses. Pour le Conseil fédéral, ce serait le scénario catastrophe: une alliance contre nature entre la gauche et l’eurosceptique UDC sonnerait assurément le glas d’une telle proposition en votation populaire.
C’est dans ce contexte tendu que Johann Schneider-Ammann doit multiplier les appels à la raison. Cela n’aurait pas été un problème en 2010, lorsque la gauche a favorisé son élection au Conseil fédéral. A l’époque, elle voyait en lui l’industriel n’ayant jamais licencié dans les années de crise, le patron raisonnable dénonçant les salaires exorbitants de la finance et le fervent adepte du partenariat social en tant que président de l’association Swissmem.
Mais les temps ont bien changé. Depuis, Johann Schneider-Ammann s’est enlisé dans une affaire d’optimisation fiscale à Jersey qui lui a valu l’étiquette de «conseiller fédéral offshore». Surtout, avant et après l’initiative de l’UDC «Contre l’immigration de masse» en février 2014, il ne s’est plus engagé pour renforcer les mesures d’accompagnement. La gauche a découvert en lui un libéral dur, préférant presque toujours laisser jouer les forces du marché.
«Le client n’achète pas que des machines, mais aussi de la confiance», s’est toujours plu à rappeler Johann Schneider-Ammann. Sur le fond, il n’a pas tort lorsqu’il prétend que ce n’est pas la règle des huit jours qui importe le plus, mais bien le maintien du niveau de protection des salaires suisses. Reste à savoir si sa crédibilité auprès des syndicats n’est pas trop écornée à l’heure de faire passer ce message.
Pour le Conseil fédéral, un référendum serait une catastrophe