PALÉO DEPECHE MODE, À BOUT DE SOUFFLE
En douze ans, il peut se passer beaucoup de choses. En douze ans et deux apparitions sur la Grande Scène du Paléo Festival, Depeche Mode a par exemple pris un sacré coup de vieux. Lorsque, en 2006, le trio anglais était venu une première fois sur la plaine de l’Asse, il avait offert au festival un concert d’une belle intensité, soutenu par de puissants jeux de lumière.
Et voici que mardi soir, Dave Gahan, Martin L. Gore et Andrew Fletcher, épaulés par deux musiciens additionnels, semblaient ne plus trop y croire, comme à bout, lassés par une carrière qui dure depuis près de quarante ans. Un peu comme les Red Hot Chili Peppers l’année dernière. Là où des formations moins emblématiques arrivent à se renouveler en alternant de grosses performances en open air l’été et des concerts plus intimistes en club le reste de l’année, Depeche Mode est de ces groupes condamnés à donner dans la démesure et le grandiose, car c’est cela qu’une partie du public, celle qui ne connaît que les tubes, attend d’eux. En concert au Letzigrund zurichois il y a une année, le gang de Dave Gahan, déjà, avait déçu. Le charismatique chanteur, revenu de tous les excès comme d’une longue traversée du désert vers la fin des années 1990, se déhanche certes toujours joliment, mais la voix n’y est plus. Desservi par un son approximatif, il semble exsangue, à bout de souffle. Il harangue le public, lui tend son micro, tourne tel un derviche, mais la sauce ne prend pas.
Solitude et narcolepsie
Il semble bien seul au milieu d’un trop large plateau que le groupe occupe mal – le compositeur en chef et chanteur occasionnel Gore est loin à sa droite, tandis que Fletcher semble lutter contre une narcolepsie tenace derrière ses machines.
Que dire encore, si ce n’est que le concert est mal construit, plaçant les classiques fédérateurs que sont Personal Jesus, Never Let Me Down Again, Enjoy the Silence et Just Can’t Get Enough lors de la dernière demi-heure. Auparavant, on aura eu droit à une série de titres interprétés pour la plupart mollement (It’s No Good, Precious, World in My Eyes, Somebody). Aussi, seuls les premiers rangs semblent vibrer un tant soit peu. Dommage, car sur disque, le groupe demeure intéressant, comme l’illustre Spirit, quatorzième album, sorti en mars 2017.
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