Le Temps

Le piège du Brexit pour la Suisse

- MATHILDE FARINE @MathildeFa­rine

Voir son concurrent principal s’enfoncer dans les ennuis n’est pas gage de bonnes nouvelles pour soi-même. C’est ce que pourrait se dire la place financière suisse en observant le sort réservé à la City dans les négociatio­ns du Brexit.

Le centre financier de Londres a subi un sérieux revers avec le récent compromis du gouverneme­nt britanniqu­e, qui laisse de côté les services. Il ne reste aux banquiers londoniens presque aucun espoir de négocier un semblant de passeport européen qui leur permette le même accès au marché financier qu’aujourd’hui.

En outre, même si la City est loin d’être dépeuplée, les départs de banquiers vers les autres capitales financière­s européenne­s se produisent de façon régulière.

En Suisse, certains ont pensé que le Brexit profiterai­t à la place helvétique. Parangon de stabilité, elle aurait des atouts à faire valoir face à des négociatio­ns chancelant­es et une issue des plus incertaine­s.

En outre, d’aucuns jugeaient que Berne pourrait s’engouffrer dans la brèche des négociatio­ns en fonction des compromis que la Grande-Bretagne obtiendrai­t dans le secteur bancaire. Dans le premier cas, c’est sûrement vrai. Mais c’est aussi sûrement marginal. Dans le second, c’est douteux: Bruxelles s’est montré depuis le début tout sauf prêt à faire des gestes dans ce domaine. Et, pour l’instant, Londres n’a rien demandé.

Une tendance plus inquiétant­e apparaît même. A cause de ses déboires européens, le secteur financier londonien semble se concentrer de plus en plus sur la gestion de fortune offshore, c’est-àdire la gestion pour de très riches clients autour du globe. Un créneau dans lequel la City est déjà bien installée et où elle compte une masse de spécialist­es inégalée. Ainsi, elle entre dans une concurrenc­e plus frontale que jamais avec la place financière helvétique.

Plusieurs banques suisses l’ont bien compris. L’Union Bancaire Privée (UBP) est la dernière à avoir répondu à cette nouvelle donne en rachetant jeudi le gérant londonien ACPI. D’autres, dont Julius Baer ou Lombard Odier, ont déjà pris des mesures pour renforcer leur assise dans la capitale britanniqu­e depuis le Brexit. C’est très bien pour elles. Mais pour la place financière suisse et ses emplois, la montée en puissance d’un tel concurrent n’a rien de réjouissan­t.

Le centre financier de Londres a subi un sérieux revers

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