Migros rêve d’un rayon médicaments
Le géant orange entend profiter d’une modification législative qui favorise l’automédication pour se positionner sur le marché de la pharmacopée. Les pharmaciens désapprouvent
Migros poursuit son offensive sur la pharmacie. Le géant orange entend profiter d’une révision de la loi sur les produits thérapeutiques, qui entrera en vigueur début 2019, pour se positionner sur le marché de la vente de médicaments, a révélé lundi la NZZ. Un domaine jusqu’ici largement dominé par les pharmacies et, dans une moindre mesure, les médecins, les drogueries et les hôpitaux.
L’enjeu de la modification législative? Une nouvelle classification des médicaments dans le but de promouvoir l’automédication, comme c’est déjà le cas en Allemagne. Pour ce faire, l’Institut suisse des produits thérapeutiques examine, depuis 2017, plus de 1000 médicaments susceptibles d’être vendus sans prescription médicale, détaille la NZZ. Parmi eux, Migros se profile sur les pommades utilisées pour les douleurs musculaires et articulaires, les pastilles contre la toux ou encore les préparations pour le foie.
«Pas des marchandises comme les autres»
L’ouverture du marché représenterait un pas de plus pour le leader de la grande distribution qui avait déjà créé la surprise en intégrant des pharmacies dans ses filiales en 2017. Baptisé Shop-in-Shop, le concept développé en partenariat avec la chaîne thurgovienne Zur Rose avait démarré à Berne. Bâle et Zurich avaient suivi.
Chez les fabricants de médicaments et les pharmaciens, les ambitions de Migros et une éventuelle libéralisation du marché suscitent de virulentes oppositions. Fabian Vaucher, président de PharmaSuisse, pointe du doigt les risques de l’automédication: «Les médicaments ne sont pas des marchandises comme les autres. Si le client n’est pas informé, de gros dégâts peuvent survenir.» Il évoque notamment des mélanges de médicaments aux effets contre-productifs.
Face à ces réticences, Migros déplore une «protection purement industrielle», de la part de l’industrie pharmaceutique qui n’a «rien à voir avec la protection des patients». «Migros souhaite apporter sa contribution à la réduction des coûts de la santé en facilitant l’accès à l’automédication, mais n’entend pas instaurer un système à l’américaine, précise une porte-parole au Temps. Le groupe ne vise donc pas la vente d’analgésiques comme l’aspirine ou le Neocitran.»
Selon les prévisions de Migros, qui entend proposer des tarifs 20% inférieurs à ceux du marché, le chiffre d’affaires annuel du secteur santé devrait atteindre 1% de celui du groupe d’ici à cinq ans, soit 270 millions de francs. Cela représenterait près d’un tiers du marché suisse estimé à plus de 761 millions de francs. Les premiers produits sont attendus en rayon début 2020.
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