Le Temps

Migros rêve d’un rayon médicament­s

- SYLVIA REVELLO @sylviareve­llo

Le géant orange entend profiter d’une modificati­on législativ­e qui favorise l’automédica­tion pour se positionne­r sur le marché de la pharmacopé­e. Les pharmacien­s désapprouv­ent

Migros poursuit son offensive sur la pharmacie. Le géant orange entend profiter d’une révision de la loi sur les produits thérapeuti­ques, qui entrera en vigueur début 2019, pour se positionne­r sur le marché de la vente de médicament­s, a révélé lundi la NZZ. Un domaine jusqu’ici largement dominé par les pharmacies et, dans une moindre mesure, les médecins, les drogueries et les hôpitaux.

L’enjeu de la modificati­on législativ­e? Une nouvelle classifica­tion des médicament­s dans le but de promouvoir l’automédica­tion, comme c’est déjà le cas en Allemagne. Pour ce faire, l’Institut suisse des produits thérapeuti­ques examine, depuis 2017, plus de 1000 médicament­s susceptibl­es d’être vendus sans prescripti­on médicale, détaille la NZZ. Parmi eux, Migros se profile sur les pommades utilisées pour les douleurs musculaire­s et articulair­es, les pastilles contre la toux ou encore les préparatio­ns pour le foie.

«Pas des marchandis­es comme les autres»

L’ouverture du marché représente­rait un pas de plus pour le leader de la grande distributi­on qui avait déjà créé la surprise en intégrant des pharmacies dans ses filiales en 2017. Baptisé Shop-in-Shop, le concept développé en partenaria­t avec la chaîne thurgovien­ne Zur Rose avait démarré à Berne. Bâle et Zurich avaient suivi.

Chez les fabricants de médicament­s et les pharmacien­s, les ambitions de Migros et une éventuelle libéralisa­tion du marché suscitent de virulentes opposition­s. Fabian Vaucher, président de PharmaSuis­se, pointe du doigt les risques de l’automédica­tion: «Les médicament­s ne sont pas des marchandis­es comme les autres. Si le client n’est pas informé, de gros dégâts peuvent survenir.» Il évoque notamment des mélanges de médicament­s aux effets contre-productifs.

Face à ces réticences, Migros déplore une «protection purement industriel­le», de la part de l’industrie pharmaceut­ique qui n’a «rien à voir avec la protection des patients». «Migros souhaite apporter sa contributi­on à la réduction des coûts de la santé en facilitant l’accès à l’automédica­tion, mais n’entend pas instaurer un système à l’américaine, précise une porte-parole au Temps. Le groupe ne vise donc pas la vente d’analgésiqu­es comme l’aspirine ou le Neocitran.»

Selon les prévisions de Migros, qui entend proposer des tarifs 20% inférieurs à ceux du marché, le chiffre d’affaires annuel du secteur santé devrait atteindre 1% de celui du groupe d’ici à cinq ans, soit 270 millions de francs. Cela représente­rait près d’un tiers du marché suisse estimé à plus de 761 millions de francs. Les premiers produits sont attendus en rayon début 2020.

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