Le Temps

Quelle place pour le suicide assisté en prison?

- GRÉGOIRE BAUR @GregBaur

Le débat animé sur l’assistance au suicide a désormais franchi les murs des prisons après qu’un détenu bernois a sollicité l’aide d’Exit pour mettre fin à ses jours. Sa demande est en cours d’examen

Après avoir purgé une peine pour délits sexuels, un Bernois de 64 ans aujourd’hui sous le coup de mesures d’internemen­t à Menzingen (ZG) a adressé une demande d’assistance au suicide à l’associatio­n Exit.

L’homme, atteint de maladies pulmonaire et mentale, invoque «une vie qui a perdu tout sens à [ses] yeux et n’a plus de valeur», explique-t-il dans une lettre datée du 9 juillet. Exit ne s’est pas encore déterminée, mais le débat est lancé. L’an dernier, c’est un prisonnier de La Brenaz (GE) qui avait fait part de son intérêt pour le suicide assisté auprès d’Exit, dont il n’était pas membre. L’associatio­n n’était pas entrée en matière. Ces deux cas, les seuls en Suisse à notre connaissan­ce, soulèvent de nombreuses questions.

A l’heure actuelle, aucune loi ne régit l’aide au suicide en milieu carcéral. On reconnaît aux détenus un certain nombre de droits, comme ceux de se marier, d’avoir des enfants ou de refuser l’acharnemen­t thérapeuti­que. «Mais accorder le droit de mourir pourrait être vu comme une possibilit­é d’évasion», commente le vice-président d’Exit Suisse romande, Pierre Beck.

Exit devrait statuer sur le cas zougois au plus tard fin août. Si l’associatio­n répond favorablem­ent à la demande, la justice pourrait devoir trancher. Mais, dans tous les cas, un débat s’annonce nécessaire. La population suisse vit toujours plus longtemps. Et la politique du risque zéro appliquée en matière de détention a pour conséquenc­e que les détenus restent plus longtemps emprisonné­s. Ce genre de demande pourrait augmenter dans les prochaines années.

«Accorder le droit de mourir aux détenus pourrait être vu comme une possibilit­é d’évasion»

PIERRE BECK, VICE-PRÉSIDENT D’EXIT SUISSE ROMANDE

Comme chaque été depuis 2011, le lac situé sur le glacier de la Plaine Morte s’est vidé naturellem­ent vendredi, déversant des millions de mètres cubes d’eau dans l’Oberland bernois. Un phénomène qui va s’accentuer au fil des années

La scène est impression­nante. La rivière Simme, dans le canton de Berne, se déchaîne. Des tonnes d'eau dévalent la montagne, entraînant l'évacuation de dizaines d'habitants, mais aussi la fermeture de chemins pédestres. En cause: la vidange du lac de Faverges, situé sur le glacier de la Plaine Morte, à la frontière entre les cantons de Berne et du Valais.

Le phénomène naturel a eu lieu vendredi dernier et il a atteint un niveau historique. Les quelque 2 millions de mètres cubes d'eau, issus de la fonte des neiges, se sont écoulés en 24 heures, contre 4 à 8 jours ces dernières années. Le débit enregistré, mais qui doit encore être vérifié, a atteint 100 mètres cubes par seconde. Bien au-delà du record de 2014 et ses 28 mètres cubes.

Un phénomène toujours plus fort et imprévisib­le

«C'est la plus grande vidange et de loin», confirme Isabelle Kull, une géomorphol­ogue qui étudie le phénomène depuis près de cinq ans. Elle précise qu'il est toutefois difficile d'expliquer les raisons qui font que, cette année, la débâcle ait été plus forte que lors des années précédente­s, «car nous ne pouvons pas voir ce qui se passe sous le glacier».

Or, c'est là que le phénomène prend naissance. Avant d'atteindre la rivière Simme, l'eau s'écoule sous-glaciairem­ent, dans un réseau de canaux. «Ce réseau était-il déjà formé cette année?» s'interroge Isabelle Kull pour tenter de comprendre. Impossible d'y répondre.

Une chose est sûre, en revanche, la vidange du lac des Faverges, survenue pour la première fois en 2011, est intrinsèqu­ement liée au réchauffem­ent climatique. Ce dernier provoque la fonte du glacier qui, dans une sorte d'effet domino, mène au phénomène de débâcle.

Dans les années 1980-1990, l'épaisseur de la glace était supérieure de 30 mètres au niveau actuel. «Il n'y avait aucun lac et l'eau pouvait s'écouler sans danger, tant du côté valaisan que du côté bernois», explique le glaciologu­e Matthias Huss, qui a beaucoup étudié la Plaine Morte. Le recul du glacier a modifié la donne. Il a tout d'abord permis la création du lac au début des années 2000, puis son accroissem­ent d'année en année.

Il a également modifié l'écoulement de l'eau. Depuis 2011, le glacier a atteint un seuil qui ne permet plus à l'eau de s'écouler du côté valaisan. L'entier de la masse se déverse ainsi en direction du canton de Berne et de la commune de La Lenk. La combinaiso­n de ces deux éléments provoque dès lors, chaque été, cette spectacula­ire vidange.

Et le phénomène devrait s'accentuer au cours des prochaines années. Avec une perte d'épaisseur moyenne d'un mètre par an, le glacier de la Plaine Morte va continuer de reculer, laissant de plus en plus de place à l'étendue d'eau. Or le volume du lac est un élément déterminan­t pour expliquer la force du phénomène. «Un volume plus grand impliquera nécessaire­ment une vidange plus grande», précise Isabelle Kull.

Selon les modélisati­ons de l'évolution du lac des Faverges, ce dernier devrait atteindre sa taille maximale entre 2030 et 2040. Il faudra donc réfléchir à l'évolution des moyens à mettre en place pour éviter tout incident. Et ce d'autant plus que le phénomène est imprévisib­le.

La date de la vidange ne peut en effet pas être connue à l'avance. Depuis 2012, un système de mesures a toutefois été mis en place pour étudier le niveau du lac et alerter la population dès que celui-ci commence à baisser. L'eau s'écoulant sous le glacier, il faut quelques heures avant qu'elle n'atteigne la commune de La Lenk. Les habitants ont donc le temps de se mettre à l'abri.

Vendredi, une centaine de personnes ont dû évacuer leur logement et passer la nuit dans le centre sportif du village en raison des risques d'inondation. Des sentiers pédestres ont été fermés. Aucun incident majeur n'a cependant été signalé. Mais, en devenant plus puissant, le phénomène pourrait devenir plus dangereux.

Afin de prévenir les risques, un tunnel pourrait être créé pour vidanger artificiel­lement le lac. «Cette solution a été mise en place à Grindelwal­d», indique Matthias Huss. Pour lui, un tel dispositif pourrait voir le jour à la Plaine Morte. «C'est beaucoup d'argent pour pas grand-chose, rétorque Isabelle Kull. A Grindelwal­d, avec la fonte du glacier, le niveau du lac s'est abaissé et l'eau n'atteint plus le tunnel.» La solution mise en place devient donc inutile.

A long terme, le phénomène de vidange déclinera toutefois naturellem­ent. «Selon un scénario climatique réaliste qui prévoit une augmentati­on de la températur­e de 4 degrés d'ici à 2100, le glacier de la Plaine Morte disparaîtr­a complèteme­nt entre 2070 et 2080», conclut Matthias Huss.

Avec une perte d’épaisseur moyenne d’un mètre par an, le glacier de la Plaine Morte va continuer de reculer, laissant de plus en plus de place à l’étendue d’eau

 ?? (PATRICK HUERLIMANN/KEYSTONE) ?? La rivière Simme. Les quelque 2 millions de mètres cubes d’eau, issus de la fonte des neiges, se sont écoulés en 24 heures, vendredi passé.
(PATRICK HUERLIMANN/KEYSTONE) La rivière Simme. Les quelque 2 millions de mètres cubes d’eau, issus de la fonte des neiges, se sont écoulés en 24 heures, vendredi passé.
 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland