Coup de chaud sur les vieilles centrales nucléaires suisses
La canicule met à rude épreuve les systèmes de refroidissement des réacteurs helvétiques et affecte leur production d’énergie. Un plaidoyer pour le solaire, selon les écologistes
Il fait chaud, même pour faire de la fusion nucléaire. En France voisine, les centrales du Bugey et de Saint-Alban ont ainsi temporairement été mises à l’arrêt la semaine dernière. Au bénéfice d’un mercure un peu plus bas, les installations nucléaires suisses – dont certaines comptent parmi les plus vieilles du monde – ne sont pas non plus épargnées par la canicule.
Les réacteurs souffrent, les poissons trinquent
Si certaines centrales doivent ralentir leur production en période de grande chaleur, c’est en raison du réchauffement du fleuve attenant. Indissociable d’une centrale fonctionnelle, son système de refroidissement nécessite en effet de l’eau, qui est pompée dans le cours d’eau. Or, au-dessus d’une certaine température, le précieux liquide peine à remplir son rôle rafraîchissant. Pour éviter la surchauffe, la centrale déclenche alors une baisse automatique des activités de production. La canicule pose en outre également problème lorsque, après avoir été utilisée pour refroidir le réacteur, l’eau est réinjectée dans le fleuve à une température plus élevée que celle à laquelle elle a été pompée. Ce qui n’est pas sans conséquences sur la survie des poissons.
Ces deux facteurs ralentissent les centrales les plus âgées de Suisse, dont l’antique système de refroidissement dépend directement de l’Aar. En service depuis 1972, Mühleberg (BE) tourne ainsi à 89% de ses capacités de production car la rivière a dépassé le seuil fixé par la loi, 20,5 degrés. Egalement touchée, Beznau (AG), qui date de 1969 (c’est la plus vieille centrale du monde), a aussi dû baisser son rendement. Dans une moindre mesure toutefois: 1% les fins d’après-midi. Plus modernes, les centrales de Leibstadt (AG) et de Gösgen (SO) ne dépendent quant à elles pas de la température des cours d’eau adjacents grâce à un système de tours de refroidissement.
La chaleur actuelle ne pose pas de problèmes particuliers, assure Ruth Williams, porte-parole à Swissnuclear, la faîtière des exploitants de centrales nucléaires en Suisse: «Les centrales sont faites pour résister, l’énergie qui n’est pas produite peut être aisément compensée et aucun risque de black-out n’est à craindre», ditelle. Plus que l’augmentation de la chaleur des fleuves, «c’est plutôt d’une baisse du débit qu’il faudrait se soucier». Quid de l’impact du réchauffement climatique sur la production future? «Pour une réponse exhaustive, nous devrions tout d’abord rassembler et analyser des données», répond la communicante.
«Argument pour le solaire»
Pour Pierrette Rey, porte-parole au WWF, pas de doute: «La baisse de capacité actuelle des centrales démontre, contrairement à ce qu’en disent ses partisans, que le nucléaire ne permet pas d’assurer une production d’énergie linéaire.» Face à une vague de chaleur sans précédent – et à l’imminente déconnexion de la centrale de Mühleberg, prévue pour décembre 2019 –, «c’est un argument de plus pour l’énergie solaire», souligne-t-elle.
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