GAM gèle un fonds de 7,3 milliards de francs
Après avoir suspendu son directeur des investissements, placé sous enquête interne, le gestionnaire d’actifs zurichois fait face à un reflux massif de ses investisseurs. GAM a notamment bloqué le négoce d’un important fonds
«Si GAM avait répondu à toutes les demandes de rachat, les portefeuilles se seraient de fait retrouvés avec moins de liquidités» MICHAEL KUNZ, ANALYSTE DE LA BANQUE CANTONALE DE ZURICH
De pire en pire. Voilà comment Michael Kunz, analyste de la Banque cantonale de Zurich (ZKB), décrit la situation dans laquelle se trouve GAM Holding. La société de gestion d’actifs, basée à Zurich, a annoncé jeudi le gel de toutes transactions sur des fonds représentant 7,3 milliards de francs d’actifs – la masse sous gestion de l’entreprise s’élevait à 163,8 milliards de francs au 30 juin dernier. «GAM n’avait pas le choix, elle devait réagir vite», note pour sa part René Morgenthaler, de la banque Bonhôte & Cie.
La société se devait de juguler l’hémorragie: après l’annonce mardi de la mise sous enquête et de la suspension de son directeur des investissements, Tim Haywood, les fonds sous sa supervision ont essuyé des retraits en cascade des investisseurs.
«Ce gel du fonds n’est pas surprenant», relève Andreas Venditti, analyste chez Vontobel. «Si GAM avait répondu à toutes les demandes de rachat, les portefeuilles se seraient de fait retrouvés avec moins de liquidités», précise Michael Kunz. Ce dernier ose même une comparaison avec la crise financière de 2008: «A l’époque, les retraits massifs d’investisseurs avaient aussi entraîné la suspension de nombreux fonds, dont un certain nombre avaient ensuite dû être clôturés.»
Gestion du risque à revoir
La porte-parole de GAM juge la comparaison exagérée: «Le gel des transactions n’a été décidé que pour assurer une égalité de traitement entre tous nos investisseurs», souligne Elena Logutenkova. Ainsi, même le plus modeste d’entre eux, qui n’aurait pas suivi l’actualité pendant ses vacances, ne se retrouvera pas désavantagé.
Peu d’informations filtrent en revanche sur ce que la société reproche à Tim Haywood. «Les investigations portent sur ses procédures de gestion du risque et sur ses obligations de documenter certaines décisions», note l’entreprise qui ne remet pas en question l’honnêteté de son collaborateur. «Cela laisse néanmoins entendre qu’il y a eu une erreur», relèvent les analystes. Soit il n’a pas suivi la procédure, soit celle-ci s’est avérée insuffisante.
Elena Logutenkova rappelle en outre qu’aucun autre département de la société n’est concerné par l’enquête en cours. Les fonds gelés sont des fonds d’obligations à rendement absolu (Absolute return
bond fund, ARBF), une stratégie financière permettant d’obtenir une performance toujours positive. «Nos autres divisions demeurent robustes et poursuivent leurs activités normalement.»
Reste que l’annonce de la suspension de Tim Haywood a généré suffisamment d’incertitudes pour que le titre de la société chute de plus de 25% à la bourse suisse depuis le début de la semaine.
Plusieurs mois d’enquête
Pour espérer restaurer la solide renommée dont elle bénéficiait, en particulier outre-Sarine, «la société va devoir apporter rapidement des réponses, mais aussi prendre des mesures», insiste René Morgenthaler. Parmi elles figure la possibilité de liquider le fonds. L’enquête interne prendra plusieurs semaines, voire des mois. Dans l’intervalle, le titre devrait rester sous pression.