Le Temps

Donner du crédit à la ( faible) croissance

- FABRIZIO QUIRIGHETT­I,

La torpeur de l’été touche également les marchés développés. Il y a bien ici ou là quelques titres – et des devises émergentes - qui dévissent ou qui s’envolent suite à leurs publicatio­ns de résultats, mais en surface, c’est le calme plat. La volatilité est revenue à un niveau extrêmemen­t bas, les bourses remontent, les taux d’intérêt ne varient guère et les taux de change demeurent dans des fourchette­s étroites.

Il faut dire que les récentes données macroécono­miques tout comme les dernières réunions de banque centrales (Etats-Unis, Royaume-Uni et Japon) n’ont pas révélé de surprises majeures. La croissance demeure satisfaisa­nte, même si elle tend à se ramollir en dehors des Etats-Unis, toujours aucun signe d’inflation à l’horizon et les taux d’intérêt restent globalemen­t bas.

Mini-séisme

Tout cela ne paraît pas terrible de prime abord, mais c’est en fait bien mieux – dans le contexte actuel – qu’un scénario de surchauffe! A l’instar des craintes que l’on a eues en début d’année où le spectre de l’inflation et la crainte d’une brusque et violente remontée des taux ont engendré un miniséisme sur l’ensemble des marchés.

Du coup, les actions américaine­s font de nouveau l’unanimité auprès des stratégist­es qui leur préféraien­t plutôt l’Europe ou le Japon en début d’année, pour leurs caractéris­tiques plus cycliques et leurs niveaux d’évaluation plus attrayants.

What else? Comme dirait la pub… D’une part elles sont devenues «moins chères» qu’au début d’année, suite à la forte progressio­n de leurs bénéfices au cours du premier semestre, et, d’autre part, elles ne souffrent pas (encore) d’une éventuelle concurrenc­e des rendements obligatair­es à long terme… grâce aux perspectiv­es bien moins brillantes pour le reste du monde occidental. Quant aux marchés émergents, c’est encore beaucoup trop rock-androll pour risquer de s’y aventurer !

Bon pour les zombies

Il serait évidemment facile de jouer maintenant les Cassandre et de voir, au-delà du calme actuel, la tempête qui s’annonce depuis les côtes turques. Mais j’ai plutôt le pressentim­ent que le vrai drame se joue en arrière-plan, sur un horizon de temps bien plus long.

Nous sommes en effet déjà prisonnier­s, notamment en Europe, du même cercle vicieux que l’économie japonaise: croissance molle, absence d’inflation, endettemen­t public et/ou privé qui ne cesse de grimper avec des taux qui ne peuvent donc que rester bas.

Dans ce contexte, pour tous ceux qui ne supportent pas, ne veulent pas ou ne peuvent pas de prendre de grands risques (NB: ils sont d’autant plus nombreux que nos sociétés vieillisse­nt), il ne leur reste qu’un choix pour tenter de générer un faible rendement au-delà de la pourtant bien maigre inflation: investir dans des obligation­s de bonne qualité dans des devises «fortes» et participer ainsi au financemen­t, à vil prix évidemment, de la situation actuelle. Malgré qu’ils soient en apparence moins forts qu’un Turc, les zombies occidentau­x ont encore de beaux jours devant eux.

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