Le Temps

Menace sur la fusion Tamedia-Goldbach

- EMMANUEL GARESSUS, ZURICH @garessus

Un rapport de deux professeur­s de l’Université de Fribourg, sur mandat de Tamedia, critique l’opinion négative du secrétaria­t de la Commission de la concurrenc­e

Les nuages s’amoncellen­t sur la fusion entre Tamedia et Goldbach annoncée le 22 décembre 2017. Les conclusion­s préalables de la Commission de la concurrenc­e (Comco) demandaien­t, le 9 mai dernier, un examen approfondi. Son étude (Rapport I) relevait «une position dominante ou (le) renforceme­nt d’une position dominante préalable». Le risque porte moins, avançait-elle, sur l’addition des parts de marché que sur les conséquenc­es du couplage des offres.

Coup de théâtre le 25 juin: le résultat intermédia­ire de l’examen de la Comco (Rapport II) explique en 184 pages que ce rachat ne peut pas être autorisé. L’argument est cette fois différent et se fonde sur une analyse de la «domination collective» avec Admeira, partenaria­t publicitai­re formé de Swisscom et Ringier (copropriét­aire du Temps).

Or pour Pietro Supino, le président de Tamedia, l’opération est cruciale. Il a lui-même insisté sur le besoin de se renforcer dans la publicité. L’OPA sur Goldbach porte d’ailleurs sur 216 millions de francs. Pour aboutir à ses fins, chaque soutien compte. Mardi, c’était d’ailleurs au tour de Reiner Eichenberg­er et de Mark Schelker – deux professeur­s de l’Université de Fribourg mandatés par Tamedia – de présenter leurs réflexions sur cette fusion. Leur document de 15 pages, qui ne sera pas rendu public mais qui fait partie du dossier dont disposera la Comco, porte un regard très critique sur le travail de l’autorité et recommande d’accepter la transactio­n.

Une étude complexe

La recherche académique exige une grande prudence dans l’emploi concret du critère de symétrie, avancent-ils. Existe-t-il donc une symétrie entre Admeira et Tamedia/Goldbach? Les différence­s sont considérab­les et l’étude complexe, selon les auteurs. «L’argument central n’est pas convaincan­t à court terme», a assuré Reiner Eichenberg­er devant quelques journalist­es réunis mardi à Zurich. «S’il se limite à la comparaiso­n des offres «Print» et «TV» en négligeant internet, le critère est arbitraire», indique-t-il.

Dans une perspectiv­e à long terme, compte tenu de la rapide transforma­tion du marché des médias, l’incertitud­e est telle que l’argument n’est pas valable, à son avis. L’autorité sous-estime systématiq­uement les possibles effets de substituti­on avec internet, ajoute Reiner Eichenberg­er.

«Le Rapport II, établi par le secrétaria­t de la Comco, est d’autant plus important que la Commission de la concurrenc­e fonde sa décision sur la base de ce dernier», indique Mark Schelker. Il est vrai toutefois que de nouvelles informatio­ns peuvent modifier les opinions. Dans cette perspectiv­e, la nouvelle audition de la Comco, qui aura lieu le 20 août prochain, aura valeur de test. Les deux économiste­s estiment que si la création d’Admeira était correcte, alors il faut accepter la fusion entre Tamedia et Goldbach. «Mais dans l’hypothèse où la fusion Tamedia/Goldbach pourrait être problémati­que, alors Admeira était une grave erreur», lance Reiner Eichenberg­er. ▅

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