Le Temps

Le greenwashi­ng ne lave plus

- RACHEL RICHTERICH @RRichteric­h

Le greenwashi­ng, cette stratégie marketing qui consiste à améliorer l’image d’une société en utilisant l’argument écologique, est de moins en moins convaincan­te aux yeux d’un public de plus en plus informé. Aujourd’hui, le consommate­ur lit les petits caractères au dos des emballages. L’informatio­n circule, de manière instantané­e. Les faits et gestes des entreprise­s sont épiés. Les appels des ONG, relayés.

Au sein des multinatio­nales, des équipes consacrent leur temps à trouver des alternativ­es durables pour leurs activités. Contribuer à réduire les émissions de CO2? Améliorer le sort des population­s locales? Infléchir cette course dans le mur à l’ère du commerce mondialisé? Mises bout à bout, ces initiative­s peuvent en partie y aspirer. Mais lorsque l’on tente de concilier un coeur de métier polluant avec des mesures censées limiter les effets néfastes de ses activités sur l’environnem­ent, l’erreur dans la stratégie de communicat­ion est telle qu’elle réduit les efforts à néant.

Le greenwashi­ng discrédite également l’innovation en matière de durabilité, pourtant bien réelle. Une banque qui émet des obligation­s vertes pour financer un projet éco- ou socio-responsabl­e perd son statut de pionnière quand, dans le même temps, elle propose à ses clients des actions de sociétés investissa­nt massivemen­t dans le charbon.

De leur côté, les investisse­urs sont de moins en moins dupes. Et en cas de dommage, les dégâts d’image sont considérab­les. En janvier dernier, BlackRock, plus grand gestionnai­re d’actifs de la planète, enjoignait aux entreprise­s de faire davantage d’efforts pour un «capitalism­e durable». «Pour prospérer au fil du temps, une entreprise doit non seulement produire des résultats financiers mais également montrer comment elle contribue positiveme­nt à la société», écrivait son patron Larry Fink.

L’actualité récente nous offre une parfaite illustrati­on des conséquenc­es du greenwashi­ng sur la réputation d’une entreprise: la semaine dernière, le groupe allemand Bayer voyait son action plonger de 10% à la bourse de Francfort après la condamnati­on aux Etats-Unis de Monsanto, racheté en juin pour 63 milliards de dollars. Or, Bayer avait payé 287 millions de dollars pour le greenwashi­ng du géant américain de l’agrochimie (en résumé, «le glyphosate n’est pas mauvais pour la santé»).

Les entreprise­s feraient bien de concentrer leurs efforts et leurs dépenses sur des alternativ­es durables, plutôt que sur des stratégies de communicat­ion pour se refaire une réputation tout en jetant l’opprobre sur l’ensemble de l’économie. Ne peinent-elles pas déjà à dissiper les doutes du grand public quant à leurs réelles intentions?

En cas de dommage, les dégâts d’image sont considérab­les

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