Le Temps

Dans la prévoyance comme ailleurs, c’est la transition qui fait mal

- BERNARD WUTHRICH @BdWuthrich

Bien sûr, le maintien en emploi des personnes de plus de 55 ans est une question plus vaste que celle du poids des cotisation­s au deuxième pilier. Les analyses de cette situation divergent d’ailleurs d’un expert à l’autre. Il n’empêche: après 55 ans, on coûte plus cher en prévoyance profession­nelle à son employeur, puisque, à cet âge, le prélèvemen­t paritaire destiné à alimenter le capital de deuxième pilier, nommé bonificati­on de vieillesse, passe de 15 à 18%. Quelles que soient les raisons – évolution des compétence­s, productivi­té, etc. – qui peuvent rendre plus difficile la réintégrat­ion des travailleu­rs dits âgés dans le marché du travail, cet élément est volontiers cité comme étant l’une d’elles.

Cela fait des années que des parlementa­ires de tous bords se préoccupen­t du problème du coût des seniors. Mais aucune tentative d’harmonisat­ion des taux ou d’abaissemen­t de ceux qui sont appliqués à cette tranche d’âge n’a abouti. Même le Conseil fédéral s’y est cassé les dents. Dans le cadre de la réforme Prévoyance vieillesse 2020 (PV 2020), il a proposé de diminuer tous les pourcentag­es et de ne pas dépasser 13% après 45 ans. Ce projet a échoué comme les autres. Il y a plusieurs explicatio­ns à cela.

La première est inhérente au financemen­t des retraites. Afin d’atténuer le choc de la baisse du taux de conversion du capital accumulé durant la vie active en rentes annuelles, certains cercles profession­nels considèren­t qu’il faudrait plutôt renforcer les bonificati­ons que les diminuer. Cela signifiera­it une hausse des cotisation­s, plutôt qu’une baisse de celles-ci. Le parlement s’y est essayé. Toujours dans le cadre de la PV 2020, il a envisagé d’augmenter les taux de bonificati­on pour les 35-44 ans et les 45-54 ans. Mais cette idée a sombré avec l’ensemble de la refonte du régime des retraites lorsque celle-ci a été refusée par le peuple en septembre 2017.

La seconde est propre aux grandes réformes. Le principe d’alléger les charges salariales des seniors et de permettre aux jeunes de cotiser au deuxième pilier, défendu par une initiative populaire lancée début juillet, est largement salué. Il serait sans doute retenu si l’on créait la loi sur la prévoyance profession­nelle maintenant. Seulement voilà: on a mis en place un système différent, progressif, et la transition vers un nouveau régime serait complexe et coûterait des milliards de francs pour éviter de pénaliser toute une génération. Cela rappelle d’autres cas similaires, comme celui de la transition énergétiqu­e qui entraîne un changement de mécanisme d’attributio­n des subvention­s et défavorise ceux qui ont déposé leur demande de soutien, en particulie­r pour des installati­ons photovolta­ïques, au «mauvais» moment. La question dont il faut débattre est de savoir si ce handicap doit être un frein aux réformes. Répondre par l’affirmativ­e équivaudra­it à rendre un Etat statique.

Cela rappelle d’autres cas similaires, comme la transition énergétiqu­e

Newspapers in French

Newspapers from Switzerland