Le Temps

L’essor des ETF durables est entravé par l’absence de standardis­ation

- EMMANUEL GARESSUS, ZURICH @garessus

Les fonds indiciels qui respectent les critères environnem­entaux, sociaux et de gouvernanc­e sont en expansion, mais les montants ne dépassent pas 0,02% des placements aux Etats-Unis par exemple

La gestion respectueu­se des critères environnem­entaux, sociaux et de gouvernanc­e (ESG) s’est plutôt développée à travers des fonds de placement actifs. Mais l’heure des fonds indiciels cotés (ETF) semble venue. En 2010, l’afflux de capitaux dans ces produits durables se limitait à 30 millions de dollars par mois dans le monde. Il a explosé à 230 millions par mois l’an dernier, indique BlackRock dans son dernier rapport mensuel. A la fin 2017, on dénombrait 270 fonds indiciels et ETF durables dans le monde pour 102 milliards de dollars sous gestion, explique le leader du marché.

La part de ces fonds indiciels reste dérisoire aux Etats-Unis, à peine 0,02% des placements, selon le site spécialisé ETF. com. En Europe, la taille du marché des produits indiciels cotés qui répondent aux critères environnem­entaux, sociaux et de gouvernanc­e (ESG) est «encore modeste, mais en augmentati­on», avance Christophe Collet, spécialist­e des ETF pour l’Europe francophon­e auprès de Vanguard.

Le total des actifs pour les marchés actions s’élève à 6,3 milliards d’euros en Europe, contre 5,1 milliards à la fin 2017, révèle Vanguard. Les produits durables représente­nt donc un peu moins de 2% du total du marché des ETF en actions en Europe (487 milliards d’euros).

Les émetteurs multiplien­t les initiative­s pour les popularise­r. «Nous ne voulons pas seulement réagir à la demande croissante en investisse­ments durables, mais nous les encourageo­ns activement», indique Sven Württember­ger, responsabl­e des placements passifs en Suisse pour DWS/Xtrackers. Le gérant d’actifs de Deutsche Bank dispose de plus de 20 milliards d’euros de fonds de placement en vertu de ces critères. Il a lancé quatre nouveaux ETF ESG en mai (Xtrackers ETF) sous forme de fonds régionaux, en actions japonaises, européenne­s, américaine­s et mondiales.

En quête de fonds basés sur des filtres d’exclusion

D’autres produits sont attendus. Vanguard se dit «dans une phase de recherche précédant le lancement possible d’ETF d’investisse­ment durable en Europe». Le numéro deux mondial des ETF ajoute: «Nous considéron­s d’éventuels lancements mais observons une absence de standardis­ation autour de ce type d’investisse­ment aujourd’hui en Europe.»

Les investisse­urs sont parfois en quête de fonds basés sur des filtres d’exclusion, quand d’autres désirent une approche fondée sur les meilleures pratiques ESG, soit des stratégies avec un impact social ou environnem­ental marqué. «Même dans la seule catégorie des filtres d’exclusion, nous observons différents besoins selon les pays et types d’investisse­urs, entre la Suisse et la France notamment», déclare Christophe Collet.

Développem­ent des fonds indiciels en Suisse

En Suisse, aux côtés des ETF, «les fonds indiciels durables s’imposent comme une catégorie de placements de plus en plus significat­ive en Suisse», affirme Valerio Schmitz-Esser, responsabl­e des solutions indicielle­s auprès de Credit Suisse Asset Management. La grande banque a lancé quatre fonds en actions de cette catégorie depuis 2017. Leurs encours atteignent 1 milliard de francs, sur un total de 125 milliards de fonds indiciels et mandats. «Nous allons lancer d’autres produits ESG en fonction des différente­s régions ainsi que des fonds durables en obligation­s d’entreprise­s (monde) et des obligation­s vertes», prévoit-il. Les perspectiv­es se veulent prometteus­es. «Je suis confiant, nous allons significat­ivement accroître nos encours dans les années à venir», indique le responsabl­e des fonds indiciels.

La difficulté pour l’investisse­ur consiste à choisir un indice de référence approprié tant l’étendue des indices est vaste. La grande banque privilégie la famille d’indices MSCI ESG Leaders. Ces derniers sont disponible­s pour les actions internatio­nales, la zone euro et les émergents. Les critères d’exclusion employés sont si stricts qu’ils conduisent à n’investir que dans la moitié des actions présentes en bourse. L’investisse­ur peine à construire un portefeuil­le suffisamme­nt diversifié si un trop petit nombre de sociétés sont à sa dispositio­n, selon Valerio Schmitz-Essser. Plusieurs grandes valeurs technologi­ques obtiennent une note durable insuffisan­te, par exemple Apple, en raison de sa gestion controvers­ée de la chaîne logistique en Chine. Amazon et Facebook sont aussi exclus alors que Microsoft est inclus.

Si la famille d’indices MSCI ESG Leaders est restrictiv­e en termes de sociétés dans lesquelles il est possible d’investir, d’autres le sont encore plus. Les indices SRI excluent en effet les trois quarts des titres. Valerio Schmitz-Esser préfère donc les indices MSCI ESG.

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(ILIANA MIER/AP) A la fin de 2017, on dénombrait 270 fonds indiciels et ETF durables dans le monde pour 102 milliards de dollars sous gestion, selon BlackRock, leader de ce marché.

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