L’essor des ETF durables est entravé par l’absence de standardisation
Les fonds indiciels qui respectent les critères environnementaux, sociaux et de gouvernance sont en expansion, mais les montants ne dépassent pas 0,02% des placements aux Etats-Unis par exemple
La gestion respectueuse des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) s’est plutôt développée à travers des fonds de placement actifs. Mais l’heure des fonds indiciels cotés (ETF) semble venue. En 2010, l’afflux de capitaux dans ces produits durables se limitait à 30 millions de dollars par mois dans le monde. Il a explosé à 230 millions par mois l’an dernier, indique BlackRock dans son dernier rapport mensuel. A la fin 2017, on dénombrait 270 fonds indiciels et ETF durables dans le monde pour 102 milliards de dollars sous gestion, explique le leader du marché.
La part de ces fonds indiciels reste dérisoire aux Etats-Unis, à peine 0,02% des placements, selon le site spécialisé ETF. com. En Europe, la taille du marché des produits indiciels cotés qui répondent aux critères environnementaux, sociaux et de gouvernance (ESG) est «encore modeste, mais en augmentation», avance Christophe Collet, spécialiste des ETF pour l’Europe francophone auprès de Vanguard.
Le total des actifs pour les marchés actions s’élève à 6,3 milliards d’euros en Europe, contre 5,1 milliards à la fin 2017, révèle Vanguard. Les produits durables représentent donc un peu moins de 2% du total du marché des ETF en actions en Europe (487 milliards d’euros).
Les émetteurs multiplient les initiatives pour les populariser. «Nous ne voulons pas seulement réagir à la demande croissante en investissements durables, mais nous les encourageons activement», indique Sven Württemberger, responsable des placements passifs en Suisse pour DWS/Xtrackers. Le gérant d’actifs de Deutsche Bank dispose de plus de 20 milliards d’euros de fonds de placement en vertu de ces critères. Il a lancé quatre nouveaux ETF ESG en mai (Xtrackers ETF) sous forme de fonds régionaux, en actions japonaises, européennes, américaines et mondiales.
En quête de fonds basés sur des filtres d’exclusion
D’autres produits sont attendus. Vanguard se dit «dans une phase de recherche précédant le lancement possible d’ETF d’investissement durable en Europe». Le numéro deux mondial des ETF ajoute: «Nous considérons d’éventuels lancements mais observons une absence de standardisation autour de ce type d’investissement aujourd’hui en Europe.»
Les investisseurs sont parfois en quête de fonds basés sur des filtres d’exclusion, quand d’autres désirent une approche fondée sur les meilleures pratiques ESG, soit des stratégies avec un impact social ou environnemental marqué. «Même dans la seule catégorie des filtres d’exclusion, nous observons différents besoins selon les pays et types d’investisseurs, entre la Suisse et la France notamment», déclare Christophe Collet.
Développement des fonds indiciels en Suisse
En Suisse, aux côtés des ETF, «les fonds indiciels durables s’imposent comme une catégorie de placements de plus en plus significative en Suisse», affirme Valerio Schmitz-Esser, responsable des solutions indicielles auprès de Credit Suisse Asset Management. La grande banque a lancé quatre fonds en actions de cette catégorie depuis 2017. Leurs encours atteignent 1 milliard de francs, sur un total de 125 milliards de fonds indiciels et mandats. «Nous allons lancer d’autres produits ESG en fonction des différentes régions ainsi que des fonds durables en obligations d’entreprises (monde) et des obligations vertes», prévoit-il. Les perspectives se veulent prometteuses. «Je suis confiant, nous allons significativement accroître nos encours dans les années à venir», indique le responsable des fonds indiciels.
La difficulté pour l’investisseur consiste à choisir un indice de référence approprié tant l’étendue des indices est vaste. La grande banque privilégie la famille d’indices MSCI ESG Leaders. Ces derniers sont disponibles pour les actions internationales, la zone euro et les émergents. Les critères d’exclusion employés sont si stricts qu’ils conduisent à n’investir que dans la moitié des actions présentes en bourse. L’investisseur peine à construire un portefeuille suffisamment diversifié si un trop petit nombre de sociétés sont à sa disposition, selon Valerio Schmitz-Essser. Plusieurs grandes valeurs technologiques obtiennent une note durable insuffisante, par exemple Apple, en raison de sa gestion controversée de la chaîne logistique en Chine. Amazon et Facebook sont aussi exclus alors que Microsoft est inclus.
Si la famille d’indices MSCI ESG Leaders est restrictive en termes de sociétés dans lesquelles il est possible d’investir, d’autres le sont encore plus. Les indices SRI excluent en effet les trois quarts des titres. Valerio Schmitz-Esser préfère donc les indices MSCI ESG.
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