Le Temps

Plaidoyer en faveur d’un centre de compétence pour la cybersécur­ité

- SERGE DROZ DIRECTEUR DU FORUM OF INCIDENT RESPONSE AND SECURITY TEAMS, ZURICH DANIEL STAUFFACHE­R FONDATEUR ET PRÉSIDENT, ICT4PEACE FOUNDATION, ZURICH STEFANIE FREY DIRECTRICE DE DEUTOR CYBER SECURITY SOLUTIONS, BERNE

La motion Eder, qui demande la création d’un centre de compétence pour la cybersécur­ité, a été adoptée presque à l’unanimité à la fin de l’année dernière, contre l’avis du Conseil fédéral. Les services en ligne, et internet en général, ont atteint depuis longtemps une taille critique, également en

Suisse. Les menaces susceptibl­es de leur porter atteinte ne concernent plus seulement les grands acteurs. Une attaque de l’infrastruc­ture suisse des technologi­es de l’informatio­n et de la communicat­ion (TIC) aurait des répercussi­ons négatives durables pour la place économique helvétique.

Le 4 juillet 2018, le Conseil fédéral a finalement réagi de mauvaise grâce à la motion Eder: il nommera un Monsieur ou une Madame Cyber, une personnali­té de haut rang, qui n’aura cependant aucun pouvoir directionn­el, en dépit de ce que demandait la motion. De plus, les départemen­ts concernés n’arrivent apparemmen­t pas à se mettre d’accord sur une procédure commune. Ce n’est guère une surprise dans le paysage politique suisse, mais cela garantira une fois de plus l’insatisfac­tion générale et l’absence de solution en perspectiv­e. Dans le domaine de la cybersécur­ité, la Suisse accumule du retard. Le parlement ne doit rien céder sur la mise en oeuvre de la motion Eder et doit sommer le Conseil fédéral d’accomplir cette mission.

Il importe à présent d’élaborer un projet de centre de compétence conforme à cette motion. Tous les acteurs de la Confédérat­ion, des cantons et du secteur privé doivent impérative­ment y être intégrés.

Le projet proposé doit garantir la coordinati­on des actuelles parties prenantes (en particulie­r les autorités cantonales, les autorités judiciaire­s, l’armée et le DFAE), ainsi que la pleine protection de l’ensemble de la place économique suisse, et notamment des PME. Les PME représente­nt une part prépondéra­nte des performanc­es économique­s du pays et sont tout aussi vulnérable­s que les infrastruc­tures sensibles. Mais, aujourd’hui, par manque de ressources propres et de savoir-faire, elles ne sont souvent pas en mesure d’utiliser ou de financer des technologi­es de sécurité extrêmemen­t complexes.

L’objection selon laquelle le Conseil fédéral s’est au moins préoccupé de la question, qu’il a cherché la meilleure solution «en fonction des circonstan­ces» et que la situation a progressé, se révèle malheureus­ement erronée. Investir des ressources importante­s dans une mauvaise solution entraîne des répercussi­ons plus négatives que positives. Si la démarche n’est pas coordonnée, ce sont les agresseurs qui seront les premiers gagnants. Ils profitent déjà aujourd’hui du manque de collaborat­ion de toutes les parties concernées en Suisse et à l’étranger.

Seul un organe centralisé, s’appuyant sur un état des lieux exhaustif, pourra identifier les initiative­s fructueuse­s et consolider la cybersécur­ité. Son efficacité passe par un pouvoir directionn­el clairement défini. A ce propos, des représenta­nts de l’économie privée ont déclaré à plusieurs reprises qu’ils ne voyaient aucun problème à collaborer avec un service étatique. En revanche, il est inacceptab­le pour eux de devoir travailler sur le même thème avec plusieurs services en même temps. Actuelleme­nt, les sociétés informatiq­ues sont régulièrem­ent contactées par l’OFAE, Melani, l’Ofcom et d’autres services fédéraux pour les demandes les plus diverses, ce qui n’est ni crédible ni efficace.

Dans le domaine de la cybersécur­ité, la Suisse accumule du retard

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