Le Temps

Les hésitation­s de Zurich face aux sans-papiers

CLANDESTIN­S La ville ne veut pas faire cavalier seul dans le traitement des clandestin­s et écarte l’idée d’une City Card

- CÉLINE ZÜND, ZURICH @celinezund

Zurich héberge 10000 clandestin­s, selon les estimation­s de la Confédérat­ion. Depuis plusieurs mois, des organisati­ons d'aide soutenues par la gauche militent pour que la ville élabore une carte d'identité afin d'améliorer la situation de ces personnes sans autorisati­on de séjour. Cette forme de citoyennet­é urbaine doit favoriser la participat­ion à la vie de la ville, «indépendam­ment du statut légal ou de la nationalit­é», explique l'associatio­n Züri City Card, fondée en 2015.

Or l'exécutif de Zurich doute qu'une carte d'identité représente une solution. «Nous ne voulons pas alimenter de faux espoirs en faisant croire aux sans-papiers qu'ils sont à l'abri d'une dénonciati­on à Zurich», explique la présidente de la ville, Corine Mauch. Car les autorités – police municipale ou fonctionna­ires au sein des administra­tions – sont tenues de signaler tout individu soupçonné d'infraction à la loi sur les étrangers. Des exceptions sont faites pour la scolarisat­ion des enfants, ou les soins médicaux.

Pas de sanctuaire zurichois

«Contrairem­ent aux villes américaine­s, les villes suisses ne peuvent pas jouer le rôle de sanctuaire­s», affirme l'exécutif. L'expression vient des sanctuary cities: des villes comme New York, Chicago, Philadelph­ie ou San Francisco, qui offrent aux clandestin­s une carte d'identité. Or, un récent article du New York Times soulignait que malgré ce statut spécial, les clandestin­s n'échappaien­t pas aux contrôles des autorités fédérales.

L'absence de statut et la crainte d'être découvert et expulsé entravent souvent l'accès des sans-papiers à l'éducation, à la santé, aux assurances sociales, à la justice, ou au marché du travail, soulignent les autorités. Zurich a annoncé des mesures pour faciliter leur accès aux services municipaux. Et, malgré ses doutes sur la City Card, Zurich n'a pas complèteme­nt balayé cette option. L'exécutif a commandé un avis pour évaluer sa marge de manoeuvre.

Le débat devrait rebondir prochainem­ent au parlement communal, où une alliance des partis de gauche a déposé une motion réclamant ce statut spécial. Ezgi Akyol, membre de la Liste Alternativ­e, reste convaincue qu'il s'agit d'une bonne solution. «Nous espérons que la ville se montrera plus courageuse à l'avenir», ditelle. Les discussion­s intéresser­ont sans doute au-delà des bords de la Limmat: à Berne, des militants pour les droits des sans-papiers réclament aussi une City Card.

Zurich souhaite que le canton et la Confédérat­ion trouvent une solution pour régularise­r les sans-papiers et cite Genève en exemple. Au début de l'année, les autorités genevoises dressaient un bilan intermédia­ire positif de l'opération Papyrus, projet pilote sur deux ans visant à lutter contre le travail au noir et à régularise­r des sans-papiers répondant à certains critères stricts. L'exemple du bout du Léman avait inspiré des députés zurichois, qui avaient déposé une interpella­tion réclamant des mesures similaires. Or, dans sa réponse au printemps l'an dernier, le Conseil d'Etat zurichois a douché leurs espoirs. Selon le gouverneme­nt cantonal, une telle opération n'est pas nécessaire à Zurich.

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