Le Temps

A Martigny, les Caves du Manoir fêtent leurs 40 ans et un visage neuf

La salle de concerts de Martigny s’offre un lifting, après plus de quarante ans d’existence. Pour fêter ça, l’associatio­n chargée du lieu a mis sur pied un festival, à la programmat­ion éclectique

- GRÉGOIRE BAUR @GregBaur

«C'est fou qu'elle existe toujours aujourd'hui.» Olivier Vocat, l'un des six pères fondateurs des Caves du Manoir de Martigny, est surpris mais heureux que la salle de concerts, axée sur le bénévolat, soit toujours en vie, quarante et un ans après son ouverture. Mieux, elle s'offre une seconde jeunesse pour assurer sa pérennité. Le mobilier, la sono, les lumières, tout a été remplacé pour une facture totale de 600000 francs.

«Nous entrons dans la modernité», sourit Mathieu Roduit, le président de l'associatio­n Subnascor, qui gère la salle. La rénovation est totale et pourtant le lieu conserve son âme. Sise dans les catacombes du Manoir de la ville de Martigny, construit en 1730, caractéris­ée par une voûte de pierres, la salle est intimiste. Elle peut accueillir 200 personnes. «Sa plus grande qualité, c'est cette atmosphère confinée, qui amène une énergie et une émotion que l'on ne retrouve nulle part ailleurs. Ici, les concerts sont différents, uniques», confie Mathieu Roduit.

Le pari de la diversité

Pas question donc de dénaturer cet héritage si précieux. Après rénovation, la structure de la salle reste identique. Pour la faire rayonner, les membres de l'associatio­n misent sur la diversité. Concerts, bien évidemment, mais aussi cinéma, théâtre, lectures, spectacles burlesques ou encore musique classique. Une diversité que l'on retrouve au programme du festival d'inaugurati­on de la salle, qui se tient du 15 au 23 septembre. The Young Gods, Jacky Lagger ou encore l'humoriste Jean-Louis Droz fouleront les planches de la salle martignera­ine.

Cette volonté de varier les styles et les arts n'est pas née par hasard. Au fil des années, plusieurs associatio­ns se sont succédé à la tête des Caves du Manoir, avec chacune sa sensibilit­é. «Nous voulons réunir ces quatre décennies d'évolution dans la programmat­ion pour faire découvrir ou redécouvri­r au public ce lieu historique de la culture», explique Mathieu Roduit.

De Ferré à Thiéfaine

Si aujourd'hui la salle est connue pour ses concerts, ce n'était pas sa destinée première lors de son ouverture en 1977. «Roger Crittin, le vrai fondateur, voulait pouvoir profiter de spectacles sans devoir toujours se rendre à Lausanne, raconte Olivier Vocat. Il crée donc les Caves du Manoir, sur le modèle du cabaret lausannois Les Faux-Nez.» La salle fait ainsi la part belle au théâtre, aux spectacles de cabaret et à la chanson française. De grands noms comme Yves Duteil, Hubert-Félix Thiéfaine, Patrick Timsit, Arno ou encore Maurane se produiront à Martigny. Ce n'est qu'à partir de la fin des années 1980 que la salle organise des concerts de rock, sans pour autant que les programmat­eurs laissent de côté leurs premières amours. Cabaret et rock cohabitent alors aux Caves du Manoir.

Pour Olivier Vocat, les grands moments vécus dans cette salle se comptent par dizaines, mais il y en a un qui l'a particuliè­rement marqué: le concert de Léo Ferré en septembre 1987. «C'était un rêve d'adolescent que de l'avoir sur scène», confie-t-il. Alors étudiant en droit, Olivier Vocat est le sonorisate­ur des Caves du Manoir. Il enregistre tous les concerts pour en conserver un souvenir. Mais dans sa collection, il en manque un et c'est précisémen­t celui de Léo Ferré. Aujourd'hui, il en rigole: «Mon enregistre­ur n'a pas fonctionné ce soir-là. Je n'ai qu'une seule chanson de son passage à Martigny.»

Un seul regret

Si la grande majorité des souvenirs sont bons, Olivier Vocat a tout de même un regret, celui d'avoir «trop tiré sur le bénévolat». Il reconnaît que cela n'a peut-être pas facilité la pérennisat­ion du lieu et que ce dernier serait certaineme­nt plus profession­nel aujourd'hui, «si on avait été moins bêtes à l'époque». Mais cela aurait également pu métamorpho­ser le visage de la salle et donc modifier son âme. Au début des années 1990, la volonté de l'associatio­n chargée du lieu est en effet de l'agrandir, pour faire passer sa capacité à 700 voire 800 personnes. Un projet qui ne verra finalement jamais le jour.

Aujourd'hui, la salle, dans sa configurat­ion, est identique à celle de 1977 et c'est ce qui fait sa particular­ité. Olivier Vocat, lui, s'est tourné vers la musique classique, devenant le directeur général du Sion Festival. Pourtant, ses années à la tête de «la plus vieille salle de concerts de Suisse romande toujours en vie» le rattrapent souvent. «Lorsque les médias m'appellent, c'est souvent pour parler des Caves du Manoir et rarement du Sion Festival», conclut-il le sourire aux lèvres. ■

Caves du Manoir, Martigny, festival d’inaugurati­on de la nouvelle salle, du 15 au 23 septembre, cavesduman­oir.ch

 ?? (SEDRIK NEMETH POUR LE TEMPS) ?? Mathieu Roduit (à gauche), président de l’associatio­n Subnascor, chargée de la gestion des Caves du Manoir, et Olivier Vocat, un des six mousquetai­res qui ont lancé la mythique salle de Martigny.
(SEDRIK NEMETH POUR LE TEMPS) Mathieu Roduit (à gauche), président de l’associatio­n Subnascor, chargée de la gestion des Caves du Manoir, et Olivier Vocat, un des six mousquetai­res qui ont lancé la mythique salle de Martigny.

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