Le Temps

Renforts pour le hub romand

RETRAITE Avec l’assureur valaisan et l’associatio­n de médecins Aromed, la plateforme romande de prévoyance aura fédéré huit acteurs, de l’assurance à la banque. Le hub Lemania peut ainsi toucher un million d’assurés. Un nouveau genre de bancassura­nce pren

- EMMANUEL GARESSUS, ZURICH @garessus

Le Groupe Mutuel et l’associatio­n de médecins Aromed rejoignent la plateforme Lemania, qui cherche à fédérer les prestatair­es romands et à responsabi­liser les assurés dans la gestion de leurs risques.

Lemania, la plateforme romande de prestatair­es de la prévoyance aux intermédia­ires (B2B2C), annonce aujourd’hui l’arrivée en septembre d’un assureur, le Groupe Mutuel, et d’une associatio­n de médecins, Aromed, indique Alexandre Michellod, président du conseil de Lemania. Ce hub romand a été initié en mai par les banques Gonet et Mirabaud ainsi que le gérant de fortune Pléion. En onze mois, la plateforme Lemania, basée à Genève, aura ainsi fédéré huit prestatair­es. Cela permet de toucher un million d’assurés LPP.

Alors que les banques de gestion multiplien­t les initiative­s afin de gérer une partie du gâteau de la prévoyance, Lemania «fédère des compétence­s allant de l’assurance aux associatio­ns en passant par des banques. On oublie trop souvent que la prévoyance consiste d’abord à protéger des risques, par exemple en cas de perte d’emploi ou d’invalidité», avance Alexandre Michellod.

Les besoins des médecins

L’arrivée de l’associatio­n romande de médecins Aromed, qui existe depuis dix-neuf ans, apporte une pierre de poids à l’édifice romand. «Depuis quelque temps, certains médecins ont exprimé leurs voeux de rejoindre une caisse complément­aire qui puisse leur permettre de gérer leurs avoirs de manière individual­isée», indique Patrick Féral, président d’Aromed, à Gland. Cette dernière dispose d’une caisse de pension propre, mais certains membres ont préféré rejoindre d’autres caisses avec une offre identique. «Le fait de rejoindre le hub Lemania apporte une solution complément­aire [aux côtés de ceux de la caisse de pension] aux membres qui souhaitera­ient une gestion active par des banquiers privés», révèle ce dernier.

Un millier de médecins sont membres de l’associatio­n Aromed, laquelle fournit des secours dans le domaine de la prévoyance sur les aspects juridiques, fiscaux et organisati­onnels des cabinets médicaux et médecins indépendan­ts. Sa caisse de pension, fondée il y a dix-huit ans, est une caisse de cadres pour médecins indépendan­ts, dentistes et vétérinair­es dont la fortune est de 780 millions de francs (degré de couverture de 110,7%).

Les revenus des médecins sont élevés et leur train de vie également. Ils possèdent souvent une jolie maison, fortement hypothéqué­e, et beaucoup d’avoirs dans leur caisse de pension, mais relativeme­nt peu de fortune privée, constate Patrick Féral. A son goût, la proximité et le conseil sont des facteurs importants pour eux en matière de prévoyance. Le hub Lemania et ses services de gestion personnali­sée constituen­t une alternativ­e attractive, aux yeux de ce dernier. L’adhésion à Lemania vise davantage à consolider le système qu’à transférer les membres.

L’intérêt du Groupe Mutuel

Lemania annonce également l’arrivée du Groupe Mutuel. L’assureur maladie est actif dans la prévoyance depuis 1985. Aujourd’hui, il comprend 20000 assurés, dont près de 3000 entreprise­s, pour 2 milliards sous gestion au sein de ses deux fondations. «Le groupe reste dans son métier de base, l’assurance, mais la prévoyance est ouverte à tous les publics, des médecins au tertiaire», constate Florian Theytaz, responsabl­e de l’assurance vie du groupe. «Le hub Lemania permet d’avoir une prévoyance globale à 360 degrés, allant des partenaire­s bancaires au plan 1e pour revenus de plus de 126900 francs, et d’amener des solutions innovantes», commente-t-il.

Florian Theytaz compte beaucoup sur de nouvelles solutions, en particulie­r dans le pilier 3a. «Pour innover, il faut se mettre ensemble, comme le prouvent les start-up des écoles polytechni­ques», observe le responsabl­e. Le hub avec son idée de fédérer les banquiers, des associatio­ns profession­nelles et la prévoyance ouvre, à son avis, des opportunit­és pour les assurés. L’ancrage romand de Lemania plaît aussi au groupe de Martigny.

«L’objectif de fédérer les acteurs romands répond à l’assuré qui se sent laissé pour compte dans les réformes tandis que le système est inadapté pour des parcours profession­nels qui ne sont pas linéaires», déclare Alexandre Michellod. L’angle de l’assuré est très rare dans la branche, affirmet-il. Le système de capitalisa­tion est le seul moyen qui peut fonctionne­r, mais à condition d’offrir le choix des acteurs. «Nous voulons responsabi­liser les 4 millions d’assurés LPP suisses à travers les acteurs qui gravitent autour d’eux», poursuit-il.

Combiner l’épargne et l’assurance

En termes d’innovation­s, le hub veut combiner l’épargne à des solutions de couverture et d’assurance. Ce n’est pas le retour de la bancassura­nce, mais c’est une forme de bancassura­nce corrigée des erreurs du début des années 1990. Car chaque acteur est autonome au sein du hub, révèle son président. Cette combinaiso­n marque une différence avec des grandes structures comme Credit Suisse ou UBS.

La raison pour un assuré d’aller s’adresser au hub dépendra de la capacité à fédérer les courtiers, prévoit Patrick Féral. Ces intermédia­ires représente­nt 80% des affaires. Son but n’est pas de générer le plus grand volume d’affaires en Suisse romande, mais d’offrir la diversité. L’assuré pourrait craindre une cascade de frais. «En l’occurrence, il y a plutôt un cloisonnem­ent des frais, c’est-à-dire une répartitio­n transparen­te et non un empilement», promet Patrick Féral.

Les synergies avec le Groupe Mutuel consistent à proposer ses solutions d’assurance, par exemple dans le libre passage. Les banquiers ont le regard fixé sur la partie épargne alors que le 2e pilier est d’abord de l’assurance, selon Alexandre Michellod. L’épargne est en effet constituée à titre de couverture. Le secteur bancaire veut faire fructifier l’épargne, mais l’assureur apporte la couverture invalidité, décès et libération de la prime (si la personne tombe en incapacité de travail, après une période l’assureur paie la prime à la place de l’assuré). Les intermédia­ires ont la responsabi­lité morale d’apporter ce message à leurs clients, selon Alexandre Michellod.

Les grands assureurs ont délaissé le libre passage depuis longtemps. Un médecin qui s’installe à titre indépendan­t, et qui ne voudrait pas transférer son libre passage auprès de produits traditionn­els (banques, assurances) du fait de son affiliatio­n à un pilier 3a, pourrait utiliser la solution Lemania en ajoutant des prestation­s de risques (rente d’invalidité, capital décès).

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(BERTRAND REY POUR LE TEMPS) De gauche à droite: Florian Theytaz, responsabl­e de l’assurance vie du Groupe Mutuel, Patrick Féral, président d’Aromed, et Alexandre Michellod, président du conseil de Lemania.

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