Le Temps

«Une nouvelle perte de pouvoir d’achat pour les assurés»

- STEFAN MEIERHANS «MONSIEUR PRIX» PROPOS RECUEILLIS PAR M. G.

Le surveillan­t des prix et membre du panel d’experts auteur d’un rapport fouillé en octobre 2017 estime que le Conseil fédéral n’est pas assez courageux dans sa politique de la santé.

La hausse des primes ne se monte qu’à 1,2% en moyenne pour 2019. Faut-il s’en réjouir? Attention, une hirondelle ne fait pas encore le printemps. On peut s’en réjouir, bien sûr. Mais il faut préciser que la méthode de calcul de l’Office fédéral de la santé publique a changé. Si on emploie l’ancienne, on arrive en fait à une hausse de 2,7% des primes. C’est donc une hausse qui est plus élevée que la croissance du PIB, qui s’est montée à 1,2% l’an dernier, et surtout plus forte que celle des salaires, qui a été de 0,38%. Pour le citoyen et assuré, les primes 2019 se traduisent par une nouvelle perte de pouvoir d’achat, laquelle sera encore plus marquée pour les Romands que pour les Alémanique­s.

Pensez-vous que les acteurs de la santé ont pris conscience de la nécessité de juguler la hausse des coûts? Pour l’instant, je ne vois aucune améliorati­on à ce sujet. En ce qui concerne les tarifs du Tarmed dans le domaine ambulatoir­e, la bagarre continue. Le Conseil fédéral a certes imposé des économies pour 470 millions, mais on attend depuis huit ans la grande réforme d’une nouvelle structure tarifaire. Les parties, soit les assureurs et les prestatair­es de soins, sont toujours incapables de se mettre d’accord et ainsi d’assumer leurs responsabi­lités.

Alain Berset rappelle qu’il a déjà obtenu des économies pour un milliard par an sur le prix des médicament­s. Peut-il faire plus? Oui, il reste un potentiel de plus d’un demi-milliard de francs uniquement sur les génériques et les marges de distributi­on, sans parler des nouveaux médicament­s très chers dont les effets bénéfiques ne sont pas toujours évidents. Concernant le prix de référence des génériques, la résistance de l’industrie pharmaceut­ique et de ses alliés demeure forte. La réforme que constituer­ait ce changement de système est en danger.

Comment voyez-vous la tendance évoluer? Tout dépendra du courage dont fera preuve le Conseil fédéral pour mettre en oeuvre les 38 mesures que le panel d’experts de la Confédérat­ion a proposées dans son rapport d’octobre 2017. Le gouverneme­nt doit reprendre la barre de ce paquebot des coûts de la santé pour s’imposer face à tous ces lobbies. J’ai parfois l’impression qu’il en a peur avant même d’engager des réformes qui déploient de vrais effets.

Quelle mesure concrète le parlement doit-il prendre? L’introducti­on d’un objectif contraigna­nt et global de maîtrise des coûts est dans la situation actuelle l’instrument le plus efficace dans la mesure où il aurait un effet immédiat. Le Conseil fédéral ne l’a pas encore retenu dans son catalogue soumis au parlement. Je regrette qu’il n’ait pas été plus courageux.

Malgré l’article expériment­al qui permet des projets pilotes sans modifier la loi? C’est une mesure pour favoriser l’innovation, elle est donc intéressan­te. Mais je n’en attends pas de miracle. Mieux vaudrait commencer par les 37 autres mesures qui sont déjà sur la table. ▅

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