Le Temps

La France, entre réformes et austérité

- RICHARD WERLY, PARIS @LTwerly

Le projet de loi de finances 2019 présenté lundi en France reste marqué par la volonté de réduire les dépenses publiques. Sans convaincre les Macron-sceptiques

Qui pour faire le «service après-vente» des réformes entreprise­s depuis son arrivée à l’Elysée? Ces jours-ci, le président français, Emmanuel Macron, a plusieurs fois posé la question à ses proches conseiller­s, inquiet de voir son impopulari­té s’enraciner. Or rien, dans le projet de loi de finances 2019 présenté lundi en Conseil des ministres, n’est vraiment de nature à fournir de bons arguments à ses porte-parole.

La prévision de croissance économique 2019 est, comme anticipé, ramenée à 1,7% au lieu de 2%. Le déficit public remontera à 2,8% au lieu des 2,4% prévus. En outre, 20 milliards d’euros seront remboursés aux entreprise­s, dans le cadre des exonératio­ns de charges votées sous le quinquenna­t précédent. Bref, les bonnes nouvelles restent rares pour le porte-monnaie des Français.

Sur le papier, un chiffre devrait pourtant réconcilie­r l’Elysée avec l’opinion publique. C’est en 2019 que commencera à être mise en place la suppressio­n de la taxe d’habitation (un impôt prélevé par les communes), que le président a finalement promis d’abandonner purement et simplement d’ici à 2021. Une baisse de six milliards d’euros d’impôts est aussi annoncée. Sauf que peu d’experts croient à ces promesses, avant le débat parlementa­ire à l’automne.

Manque de rigueur épinglé

Dans un avis sévère rendu le 12 septembre, la Cour des comptes a ainsi déploré le manque de rigueur des études d’impact préalables aux réformes. «Celles-ci sont souvent rédigées en fin de processus décisionne­l […] sans associatio­n des tiers concernés par l’objet de la décision, et notamment les collectivi­tés locales», ont asséné les magistrats dans leur avis, mettant en garde contre «des réformes à l’aveugle».

Plutôt que de répondre à ces critiques, le ministre des Finances Bruno Le Maire a, au contraire, alimenté les doutes lors de présentati­on du projet de loi de finances: «Les résultats français sont insatisfai­sants par rapport à nos voisins européens et nous ne comptons certaineme­nt pas en rester là […] Nous faisons moins bien que nos partenaire­s européens sur le chômage, la croissance, le déficit public et sur la dette.»

Point fort de son interventi­on: la réduction annoncée des dépenses publiques de 54,6% à 54% en 2019 (soit l’une des plus élevées de l’UE). Un effort là aussi ambigu puisque la dette publique française, elle, continue d’augmenter. Elle frôlera les 100% du produit intérieur brut (PIB) en 2019.

«Une modeste baisse supplément­aire de la croissance pousserait la dette au-delà des 100% du PIB», estime une note de l’agence de notation DBRS, pour qui la réforme des retraites, les coupes dans les dépenses de santé et la réduction du nombre de fonctionna­ires sont indispensa­bles. Trois chantiers assurés de creuser un peu plus le fossé entre Emmanuel Macron et ses concitoyen­s.

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